De Franse Nederlanden / Les Pays-Bas Français. Jaargang 1996
(1996)– [tijdschrift] Franse Nederlanden, De / Les Pays-Bas Français–
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TGV et transports ferrés régionaux dans le Nord-Pas-de-Calais: analyse spatiale d'une politique publique locale
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peut être exprimée en termes d'attraction/répulsion. On peut opposer la réalisation du TGV-Nord européen, perçu dans le Nord-Pas-de-Calais par les forces politiques, économiques et sociales comme un atout pour le développement régional aux controverses soulevées par le projet de TGV-Méditerranée autour duquel s'est cristallisée une contestation bâtie sur les nuisances causées aux habitants par cette infrastructure.
En termes d'analyse des politiques publiques ces positions déterminent deux types d'interventions:
Partant de l'exemple du Nord-Pas-de-Calais, on formulera les interrogations suivantes: comment le local peut-il investir un objet technique conçu à et pour une autre échelle afin qu'il participe à la construction de sa propre identité territoriale? autour de quels enjeux spatiaux? | |||||||||||
1) Le tracé du TGV-Nord dans le Nord-Pas-de-Calais:Nous ne reviendrons pas sur le processus de décision qui a marqué l'adoption du tracé du TGV-Nord. Rappelons simplement que la commission nationale (Commission Rudeau) chargée d'évaluer les tracés avait à se prononcer sur trois options concurrentes (voir schéma): l'une passait par Amiens (tracé A et sa variante A'); une autre par Lille (tracé B) et la troisième desservait St-Quentin. | |||||||||||
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![]() Le tracé B a eu la préférence de la commission et ses recommandations ont été suivies par le gouvernement qui a annoncé sa mise en oeuvre le 28.10.1987.
Les points forts de cette variante peuvent être résumés par quatre caractéristiques:
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On notera que les villes qui ont développé ou soutenu des projets concurrents de la liaison adoptée sont celles qui bénéficiaient antérieurement de rentes de situation du fait de leur position privilégiée sur un axe international à très fort trafic:
Le choix du tracé B a fait craindre à ces deux agglomérations, à juste titre, une forte réduction des fréquences sur les axes traditionnels et l'on comprend qu'elles aient cherché à préserver leurs rentes de situation en se faisant force de proposition. Cependant, indépendamment des qualités techniques propres des projets proposés, sur le plan du fonctionnement politico-institutionnel, l'un et l'autre paraissaient fragiles: d'une part, parce qu'ils constituaient un facteur de division au sein de l'entité régionale picarde et d'autre part, parce qu'ils n'ont pas réussi à faire naître une solidarité inter-régionale en ralliant à leur point de vue certains secteurs géographiques de la région Nord-Pas-de-Calais. Miser sur le tracé C pouvait pourtant paraître séduisant pour Cambrai, Douai, Valenciennes et surtout Maubeuge; tandis que choisir le tracé A pouvait tenter Boulogne. | |||||||||||
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Pourtant, c'est unanimement que les responsables politiques de la région Nord-Pas-de-Calais se sont prononcés le 12.12.1986 en faveur du passage du TGV par Lille et de la création d'une nouvelle gare centrale pour les accueillir. Cette résolution témoigne de la capacité du milieu technico-politique local à se saisir de l'outil ‘grande vitesse’ pour le traduire en un projet unificateur à l'échelle régionale. C'est la dimension spatiale de ce projet que nous chercherons à décrire et à analyser dans ce texte, mais nous voudrions préalablement insister sur la relation entre le TGV et l'évolution du statut des villes, pour faire ressortir les enjeux liés à la desserte lilloise. | |||||||||||
2) Le TGV dans l'agglomération lilloise: un risque pour la cohésion régionale?La morphologie du réseau TGV qui se met progressivement en place à l'échelle européenne doit être référée à l'émergence d'un nouveau modèle urbain qui valorise la notion de villes en réseaux.
Plusieurs auteurs ont souligné cette dynamique: à ce propos, J.P. Balligand et D. Maquart ont pu écrire: ‘la ville qui naît en ce moment, qui renaît, est sous-tendue par une logique propre: faire coïncider et communiquer le maximum de noeuds du maximum de réseaux. Elle l'a toujours fait, même par le passé. La nouveauté est qu'aujourd'hui elle le fait volontairement, non plus en réponse à une vision externe qui lui serait appliquée’.Ga naar eind(3)
F. Ascher, quant à lui, identifie une ‘métapole’ où ‘le développement des transports rapides et des technologies nouvelles de communication participe à la métapolisation, favorisant non la dispersion des activités à forte valeur ajoutée, mais le regroupement des fonctions économiques déterminantes à proximité des noeuds d'interconnexion des divers réseaux’.Ga naar eind(4) Même constat à propos de l'un des futuribles évoqués par A. Bieber, M.H. Massot et J.P. Orfeuil: ‘Le scénario Saint-simonien repose sur une vision structurante du libéralisme économique, qui place la puissance publique à la source des mécanismes créateurs des plus-values, tant par le biais des grandes infrastructures que | |||||||||||
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par le maintien des rentes foncières aux pôles ainsi créés. Il est favorable au progrès technologique: recherche systématique de vitesse sur les grands axes...’.Ga naar eind(5)
Le positionnement du TGV dans l'agglomération lilloise participe à cette quête de renouveau urbain et l'opération d'aménagement ‘Euralille’ qui accompagne la création de la nouvelle gare lilloise s'inscrit dans ce processus de valorisation. Ils participent à un traitement de l'espace en rupture avec le modèle pyramidal et hiérarchique qui unissait traditionnellement dans une même mécanique: métropoles d'équilibres 〈-〉 villes moyennes 〈-〉 petites villes 〈-〉 pays rural (‘territoire-mosaïque’).
Dans ce contexte, ce sont les rapports spatiaux centre-périphérie à l'échelle régionale qui sont mis en scène: le risque étant de favoriser la tendance à l'autonomisation d'une agglomération décidée ‘à jouer délibérément le jeu des réseaux, à s'y insérer, à en profiter’Ga naar eind(6) et à contribuer ainsi à accentuer les forts déséquilibres existants entre un centre (agglomération lilloise) et sa périphérie (région), que F. Damette a parfaitement mis en évidence.Ga naar eind(7) L'acceptabilité régionale du passage du TGV dans Lille devait donc s'accompagner d'une politique redistributrice systématique que les propriétés techniques du TGV allaient rendre possible et les compétences locales organiser.
On insistera sur le fait qu'à l'échelle lilloise, le travail de capture du TGV réalisé est à situer dans un contexte d'action publique locale moderniste. Il participe pleinement à la rhétorique mobilisatrice qui valorise sur le plan politique la figure de l'élu manager, de l'élu développeur. L'un des quatre objectifs majeurs défendus par P. Mauroy lors de sa campagne municipale de juin 1995 illustre clairement ce positionnement: ‘Pour une ville qui poursuit son élan: Avec le TGV et Euralille, Lille s'est propulsée vers l'an 2000. Il faut maintenant conforter l'activité économique et confirmer la capitale régionale dans sa dimension internationale’. La grille de lecture élaborée par J. LévyGa naar eind(8) apparaît parfaitement opératoire pour traduire le mode de spatialisation de l'intervention politique: | |||||||||||
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Face au risque d'un TGV vecteur de déséquilibre spatial à l'échelle régionale, tout le savoir-faire des techniciens a consisté à élaborer, à faire supporter politiquement et négocier avec la SNCF un schéma de dessertes ferroviaires permettant une diffusion la plus large possible, sinon de ‘l'effet TGV’, du moins de ‘l'image TGV’. Ils ont ainsi contribué, à côté de la figure du manager, à valoriser une autre figure emblématique de l'élu: celle du protecteur, garant de l'équilibre territorial. | |||||||||||
3) La territorialisation du TGV dans la région Nord-Pas-de-Calaisa. Les facteurs d'un ‘apprivoisement’ régional du TGV.Pour qualifier le mode d'appropriation territoriale du TGV dans le Nord-Pas-de-Calais, il convient d'insister d'abord sur les conditions qui l'ont favorisé. Trois éléments peuvent alors être considérés comme un substrat efficace à la définition du projet régional:
La propriété technique de compatibilité d'exploitation du TGV avec les infrastructures ferroviaires existantes constitue une caractéristique essentielle pour comprendre le rapport de la technique au territoire. Elle permet aux TGV de circuler sur les voies classiques électrifiées. Rappelons qu'il s'agit d'une compatibilité à sens unique puisque seuls les TGV peuvent emprunter les voies nouvelles créées pour réaliser des grandes vitesses. Cette propriété a | |||||||||||
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permis d'ouvrir des relations directes plus rapides entre Paris et un ensemble de villes régionales; largement utilisée sur les réseaux Sud-Est et Atlantique, elle a été introduite sur le réseau Nord lorsque la ligne nouvelle a été construite.
La géographie ferroviaire du Nord-Pas-de-Calais confère à la compatibilité des infrastructures tout son sens. L'intérêt de celle-ci est, en effet, fonction de l'importance des axes ferroviaires régionaux et des villes qu'ils desservent. De ce point de vue, le Nord-Pas-de-Calais apparaît en France particulièrement bien doté puisque, si l'on retient comme indicateur le kilométrage de lignes rapporté à la surface du territoire, cette région arrive en tête des régions françaises (hors Ile-de-France). Le rail dessert ainsi les nombreuses agglomérations de la région la plus densément peuplée de France (hors Ile-de-France).
L'existence d'un milieu technico-politique local sensible au thème du développement ferroviaire qui s'est affirmé dès la mise en place de l'Établissement Public Régional en 1974. À cette époque, le Nord-Pas-de-Calais qui ne figurait pas parmi les régions pilotes choisies par le gouvernement pour réaliser un schéma régional des transports collectifs, s'est porté volontaire pour en établir un. Il a débouché sur la première convention d'exploitation signée en 1978 entre l'Établissement Public, la SNCF et l'État. Sa mise en oeuvre a été considérée par tous comme une réussite: l'accroissement de l'offre, l'amélioration du confort et de l'image se sont soldés par une forte hausse de la fréquentation des services ferroviaires. Les structures de travail qui ont fonctionné durant cette période autour du transport collectif régional ont favorisé un apprentissage mutuel et un partenariat entre la SNCF, les organismes déconcentrés de l'État, et les élus locaux; elles ont perduré jusque vers le milieu des années 80. En 1982, lorsque la Région devient collectivité territoriale et se dote de services propres, elle intègre d'emblée le cheminot mis à disposition par la SNCF à un poste clé de l'organigramme de ses services. En 1986, après les premières élections régionales, la Commission Transport sera renforcée et remplacera le groupe de travail mixte qui oeuvrait précédemment. Cette évolution, conforme à l'affirmation d'un pouvoir politique | |||||||||||
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régional, n'entame en rien les excellentes relations qui unissent élus et techniciens. Dans le jeu local, le mixage Région/SNCF permet à la nouvelle entité territoriale de disposer d'une capacité d'expertise technique réelle, peut-être mieux assise que dans d'autres domaines, ce qui place ce secteur d'activité en position de force au sein des services régionaux. C'est également un atout important pour une collectivité nouvelle qui cherche ses marques et les hommes de la SNCF sauront parfaitement faire reconnaître leur crédibilité au sein de la Région. Ainsi, lorsque le dossier TGV émergera à partir de 1986, les mécanismes institutionnels aptes à le traiter auront déjà été rodés dans les années antérieures et faciliteront une appropriation territoriale du projet.
Les spécificités techniques du TGV, la géographie ferroviaire et la constitution d'un milieu technico-politique local ont conjugué leurs effets pour permettre l'élaboration d'un schéma de réorganisation du système ferroviaire régional supporté par l'ensemble des élus. Nous voudrions maintenant en rapporter les principales caractéristiques en mettant en avant la relation entre les choix techniques et leurs implications spatiales et territoriales. | |||||||||||
b. TGV et infrastructures ferroviaires classiques: comment organiser de la cohésion régionale à partir d'un facteur d'inégalité?A l'échelle régionale, la contrepartie du soutien (y compris financier) apporté au passage du TGV dans Lille devait permettre d'une part, de maintenir un réseau régional de qualité et d'autre part, de faire profiter les autres agglomérations de ce nouveau mode de transport. C'est à partir de ces conditions initiales qu'il convient d'apprécier le travail réalisé par le milieu technico-politique local pour créer du consensus autour d'un projet territorial. Pour y parvenir, la définition d'un schéma de réorganisation du système de transports ferroviaires s'est articulé autour de trois dimensions complémentaires: compensation, irrigation, articulation.
La compensation. Elle est liée au changement de nature de l'offre ferroviaire; avec l'introduction du TGV on est passé d'un réseau | |||||||||||
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unitaire, brassant des circulations multiples sur chaque axe à un réseau séparatif qui contribue à disjoindre les différentes catégories de circulation. Aux liaisons nationales rapides et express qui effectuaient une desserte ‘grande ligne’ avec des arrêts intermédiaires et un cabotage entre ces points, se sont substituées des liaisons directes, à grande vitesse, de pôle à pôle, orientées vers la région parisienne. Pour illustrer cette évolution, on peut prendre l'exemple des trains Paris/Lille qui assuraient aussi dans le Nord-Pas-de-Calais une fonction de desserte intra-régionale concernant Arras et Douai; le TGV a segmenté cette offre en proposant trois types de relations distinctes: Paris 〈-〉Lille; Paris 〈-〉 Douai; Paris 〈-〉 Arras et supprimé les possibilités de cabotage local. L'autorité régionale responsable des transports a alors systématiquement assuré une compensation de l'offre interne préalablement effectuée par le service ‘grande ligne’: tous les axes concernés ont été étudiés et des relations TER (Transport Express Régional) créées en substitution des services supprimés. Ce mécanisme, qui a permis de maintenir l'offre intra-régionale à un niveau équivalent à celui qui existait avant l'arrivée du TGV, trouve ses limites lorsque des liaisons interrégionales de proximité sont en jeu. La comparaison des services ferroviaires entre Arras (Nord-Pas-de-Calais) et Amiens (Picardie) en 1982 et en 1995 témoigne d'une dégradation sensible en termes de fréquences comme de temps de parcours:![]() L'irrigation. Elle est liée à la compatibilité et consiste à permettre des initialisations de TGV à partir du plus grand nombre possible de villes de la région. On peut distinguer trois catégories de sites: | |||||||||||
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L'opportunité de l'irrigation TGV a entraîné la multiplication des demandes locales: pas moins de 16 sites sont aujourd'hui reliés à Paris sans rupture de charge. Toutes les agglomérations du Nord-Pas-de-Calais de plus de 100000 habitants sauf Maubeuge disposent d'initialisations TGV. Les pressions locales ont conduit à inclure de petites villes comme Cambrai (48000 hab.) ou St-Omer (54000 hab.) dans les liste des ‘sites TGV’, montrant à quel point est puissant l'effet d'image de cet objet technique. Quelle signification donner à cette irrigation régionale face à l'idée de politique publique locale? Il convient de rappeler ici le rôle de la Région comme garant d'une certaine égalité territoriale face à la tendance ‘réductionniste’ du réseau. F. PlassardGa naar eind(9) a insisté sur la relation entre l'accroissement des vitesses et la concentration du nombre de noeuds qui accompagne la modernisation des réseaux de transport. Cette évolution crée de fortes disparités en termes d'accessibilité. L'irrigation du territoire régional par le TGV peut alors apparaître comme un réflexe de défense contre la polarisation | |||||||||||
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qui accompagnerait une métropolisation lilloise. Favoriser une irrigation maximale de son territoire en jouant sur la compatibilité du TGV peut alors être perçu comme un moyen de réduire la visibilité de la hiérarchisation imposée par le réseau au profit d'une homogénéisation dont la presse se fait l'écho lorsqu'elle titre ‘Nord-Pas-de-Calais, 14 villes dopées par le TGV’ (Moniteur 13/3/93). Il s'agit bien sûr d'une utopie égalitaire qui ne résiste pas à l'examen des fréquences: car, qu'y-a-t-il de commun entre l'unique TGV qui relie chaque jour Boulogne à Paris et les 16 dessertes quotidiennes organisées depuis Lille? Le développement de l'interconnexion des TGV qui permet d'éviter les ruptures de charge à Paris comme l'internationalisation des relations (TGV-Nord européen) éclairent cette fiction d'égalité. Ces deux évolutions majeures dans la fonctionnalité du réseau, par les changements d'échelles qu'elles postulent, impliquent un renforcement de la polarisation et de la hiérarchisation du système: seul un nombre limité de sites sont directement concernés par cette double ouverture, posant avec plus d'acuité la question de l'articulation des réseaux. ![]() | |||||||||||
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![]() L'articulation. L'organisation de rabattements avec des transports ferrés régionaux (TER) sur les sites TGV les mieux desservis peut compléter le dispositif en vue d'améliorer une accessibilité globale. Là encore, cette possibilité a été explorée par les services régionaux et la SNCF pour chaque liaison régionale. Un calage des horaires a été réalisé et des offres TER nouvelles mises en service afin de mieux mettre en adéquation TGV et TER. Mais, cette recherche de complémentarité TGV/TER peut-elle constituer, dans les conditions actuelles, une alternative valable à la diffusion du TGV? A ce propos, O. KleinGa naar eind(10) a déjà rapporté l'échec de ‘Stélyrail’ entre St-Etienne et Lyon qui, avec ses caractéristiques de train de banlieue, s'est avéré inadapté pour une mission de diffusion régionale de ‘l'effet TGV’. Des enquêtes récentes réalisées dans le Nord-Pas-de-Calais confirment ces conclusions. Elles montrent que:
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ConclusionEn utilisant les trois leviers que constituent la compensation des dessertes, l'irrigation TGV et l'articulation TGV/TER, les responsables régionaux ont su élaborer un schéma permettant un ‘apprivoisement’ de la grande vitesse. Ils ont dessiné un véritable projet territorial qui a pu être partagé et approprié par l'ensemble des élus et représentants du monde économique et social. Ils ont tenté de réduire, à l'échelle régionale les déséquilibres spatiaux introduits par la nouvelle hiérarchisation du réseau ferroviaire national et européen. Ils ont ainsi pu faire passer la place privilégiée de Lille dans le dispositif de desserte comme un atout pour l'ensemble de la Région et non comme un vecteur de désintégration territoriale.
Cette politique de territorialisation du TGV qui a constitué l'essentiel de l'action régionale dans le secteur ferroviaire du précédent contrat de Plan État/Région (1989/93) a porté sur une amélioration de l'accessibilité externe de la Région; pour l'accessibilité interne, c'est seulement en termes de compensations que la question a été posée. D'une certaine manière, on pourrait dire que les investissements réalisés pour accueillir le TGV ont repoussé la question du développement du réseau intra-régional.
Dans ce contexte, c'est aujourd'hui l'amélioration des relations internes à la Région qui occupe le coeur des débats. Une politique de modernisation du matériel et des gares a été lancée: elle concerne prioritairement les axes Lille/Jeumont et Lille/Lens | |||||||||||
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(contrat de Plan État/Région 1994/98). Mais, au sein des services techniques régionaux se développe également l'idée d'une possible utilisation future des voies nouvelles conçues pour la grande vitesse avec des rames TGV spécifiques pour assurer des liaisons rapides sur deux axes: Boulogne-Calais-Lille-Arras et Dunkerque-Lille-Arras. Cette ambition, si elle se matérialisait, permettrait à la fois de décharger des axes TER saturés, et de réaliser d'appréciables gains de temps entre les pôles desservis. Son coût serait cependant important et les fréquences modestes. Cette nouvelle étape aurait aussi un effet en termes de politique publique locale: on pourrait y voir le passage du registre de l'action coordonnée à celui de l'action pervertie; les autorités locales introduisant des distorsions dans l'application d'une politique sectorielle (TGV) définie à une autre échelle qui n'avait pas inclus initialement cette dimension. | |||||||||||
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Samenvatting:Het ligt niet voor de hand dat de lokale politiek zich bezighoudt met een technisch dossier als de TGV, omdat zo'n dossier vooral nationaal van aard is. Toch heeft het regionale niveau hier zeker een rol gespeeld, in een Franse staat die ondertussen al een tijdje de weg van de decentralisatie is ingeslagen.
Bij het inpassen van de TGV moet steeds rekening worden gehouden met territoriale eigenheden: terwijl de TGV-Méditerranée botste op hardnekkige weerstand van de plaatselijke bevolking omwille van de te verwachten problemen met het milieu, werd de TGV in de Nord-Pas-de-Calais algemeen ontvangen als een unieke kans voor de regionale ontwikkeling. In het eerste geval zorgde dit voor aanzienlijke vertraging van het project, terwijl in het tweede geval de lokale instanties en de SNCF hun krachten gingen bundelen voor een optimale uitvoering van het project in de regio.
Er moest gekozen worden tussen drie mogelijke tracés: het eerste liep via Amiens (tracé A en de variant A'), het tweede via Rijsel (tracé B), en het derde via Saint-Quentin (tracé C). Het tracé B kreeg de overhand, om vier redenen: een haast unanieme steun van de lokale politiek, de mogelijkheid om op die manier vanuit Rijsel te zorgen voor een herverdeling over de regio van de effecten van de TGV, het project voor de realisatie van een dienstencentrum en een nieuw station in het hartje van de metropool, en ten slotte de voordelen voor het milieu van een tracé dat grotendeels de snelweg A1 zou volgen.
De twee andere projecten werden vooral gesteund door de steden die er direct baat bij hadden: Amiens was gelegen op de as Parijs-Londen, met in 1983 1,6 miljoen reizigers, en Saint-Quentin sluisde tot de komst van de TGV jaarlijks 2,3 miljoen reizigers door naar Nederland. Ook al kon je stellen dat bv. Kamerijk | |||||||||||
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(Cambrai), Dowaai (Douai), Valencijn (Valenciennes) en Maubeuge baat hadden bij een ondersteuning van tracé C, en Bonen (Boulogne) bij een ondersteuning van tracé A, toch kozen de politieke verantwoordelijken in de regio unaniem voor de doortocht via Rijsel.
De vorm van het TGV-netwerk dat in Europa langzamerhand uitgebouwd wordt, moet gezien worden in het licht van een nieuw stedelijk model, dat steden plaatst binnen de context van stedelijke netwerken. Ook de inplanting van de TGV in Rijsel en het project ‘Euralille’ volgde die evolutie, waarbij de nadruk lag op de betrekkingen tussen het centrum en de periferie op regionaal niveau. Om te voorkomen dat Rijsel de rol ging spelen van dominerende metropool ten nadele van de regio, moest de TGV een toepassing krijgen waarbij gezorgd werd voor een systematische herverdeling van de positieve effecten van de supersnelle trein.
Het inpassen van de TGV in de Nord-Pas-de-Calais werd begunstigd door drie factoren:
De steun vanuit de regio voor het tracé B moest uiteraard beloond worden met de nodige garanties voor een optimale inpassing in de hele regio van de positieve effecten van de TGV. Dit gebeurde door middel van een reorganisatie rond drie krachtlijnen:
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Toch blijft er voor de kleinere steden een probleem bestaan door de te lage frequentie van de TGV-verbinding met Parijs, in de steden waar die voorhanden is. Bovendien is het TER-net nog lang niet voldoende afgestemd op de TGV-lijnen. Daarom verkiezen voor een snelle verbinding met Parijs de reizigers nog steeds in hoofdzaak zich met de wagen naar Rijsel te begeven, liever dan via het lokale net naar het TGV-station te sporen.
Tot besluit kun je stellen dat de lokale politieke besluitvormers zich heel wat moeite hebben getroost om het TGV-project in te passen in een spoorwegplan dat de hele regio omvat. Op die manier slaagden zij erin de bevoorrechte plaats van Rijsel in het TGV-project voor de hele regio aanvaardbaar te maken. In de toekomst zijn er bovendien plannen voor een TGV-verbinding Boulogne-Calais-Rijsel-Atrecht en Duinkerke-Rijsel-Atrecht. Dit was door het oorspronkelijke plan op nationaal vlak zeker niet voorzien, maar het is voor de lokale politek wel een logische volgende stap.
(Samenvatting door Johan Feys) |
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