Louis de Meester 1904-1987
Le 12 décembre 1987, est décédé à Gand le compositeur Louis de Meester, dont presque tout un chacun en Flandre associe le nom à la musique électronique, mais qui pourtant laisse surtout une importante oeuvre instrumentale. Louis de Meester est né à Roulers, le 28 octobre 1904. Il ne bénéficia d'aucune formation musicale notable mais apprit en autodidacte à jouer du piano en pratiquant directement cet instrument: en 1926-27 il fut pianiste à Anvers et à Gand dans toute sorte d'établissements et circonstances et au cinéma, la musique en direct jouant un grand rôle dans le film muet. En 1928-30, nous le retrouvons en France, notamment au Touquet, à Paris, à Charleville... où il menait une vie plus ou moins errante de pianiste d'orchestre de variétés dans les films, les brasseries, les salles de danse... Il y apprit à écrire des arrangements et y fit ses premières compositions. C'est avec un groupe de ce genre qu'il atterrit en 1930 à Alger, devint membre d'un orchestre de jazz, mais finit par se fixer en 1932 au Maroc, à Meknès, où il devint professeur de solfège au conservatoire de la ville. Quelques mois plus tard, il y était déjà directeur, poste qu'il occupa jusqu'en 1937. Au cours de ces années, Louis de Meester se lança à fond dans l'étude de la musique
Louis de Meester (1904-1987).
classique mais l'indépendance d'esprit qui le caractérisait lui inspirait aussi un grand intérêt pour les modernes de l'époque. Sur les conseils de Prokofiev et de Poulenc, qui accueillaient positivement ses compositions, il revint en Belgique fin 1937 et y fut quelque temps élève de Jean Absil. Après une période d'inactivité due à la guerre, il devint en 1945 ingénieur du son à la radio belge. Cette activité le mit en contact quotidien avec des partitions et des orchestres si bien qu'il put, une fois de plus en autodidacte, enrichir ses connaissances. Il y apprit aussi à connaître les expériences concrètes et électroniques de Pierre Schaeffer et c'est ainsi qu'il commença dans les studios de la radio à essayer de faire connaître en Belgique aussi la musique électronique. Après des années d'opposition, il reçut en 1957 une reconnaissance internationale: le Prix Italia lui fut décerné pour
La grande tentation de saint Antoine qui mariait à l'orchestre classique la musique électronique. Aussi, en 1962, Louis de Meester devint-il directeur artistique de l'IPEM (
Instituut voor Psychoakoestiek en Electronische Muziek - Institut de Psycho-acoustique et de Musique Electronique), fondé par la BRT et l'université d'Etat de Gand. Il y resta en service jusqu'en 1970. C'est là que Louis de Meester initia plusieurs jeunes compositeurs aux possibilités du médium électronique et qu'il réalisa lui-même une foule de créations, essentiellement de la musique fonctionnelle pour la BRT, allant d'indicatifs pour journaux télévisés jusqu'à des bandes sonores pour jeux radiophoniques,
film ou théâtre. Bien que ces activités lui aient valu une grande notoriété auprès du grand public, son art réside surtout dans sa production musicale ‘traditionnelle’, d'une grande richesse de variété et de contenu. Louis de Meester se qualifia un jour lui-même d'artiste impulsif, et de fait, il n'est pas possible de lui appliquer une étiquette restrictive: on ne peut le cataloguer sous quelque style ou -isme que ce soit. Il ne voulait se lier à un procédé unique, fût-ce au sein d'une seule et même composition. C'est sans doute là le privilège de l'autodidacte, toujours en pleine quête et en pleine évolution, mais, au sein même de cette liberté et de cette spontanéité pourtant mûrement réfléchie et pleine de métier, qualités musicale et esthétique exigent beaucoup des dons de l'artiste. A côté d'un certain nombre d'oeuvres purement abstraites, construites sur de courts motifs (concertos pour piano, quatuors à cordes, sonates), Louis de Meester brille surtout dans des partitions pleines d'optimiste badinage comme la
Sinfonietta buffa, /les contes autour de Betje Trompet, l'opéra bouffe
Twee is te weinig... drie teveel (Deux c'est trop peu... trois c'est trop - Prix Regione Siciliana 1966) et diverses compositions sur des oeuvres de Michel de Ghelderode (Saint Antoine, Pantagleize, Magie Rouge...). Par contre
Tombeau pour Rubens (orchestre et choeurs féminins) et surtout la prenante cantate
La voix du silence, sur des textes de Maurice Carême (récitant, choeur parlé, soli, chorale, orchestre, bande sonore) témoignent d'une grande mélancolie ou d'une grande sérénité.
En 1978, Louis de Meester reçut le Prix d'Etat pour sa carrière artistique et en 1980, l'université d'Etat de Gand l'éleva à