Jef Geys,
un artiste flamand à Sāo Paulo
Le Flamand Jef Geys (
o1934) est peut-être l'un des artistes les plus originaux de la scène artistique belge d'aujourd'hui. Né à Leopoldsburg, à la frontière de la Campine anversoise et du Limbourg, il est resté sciemment très attaché à l'âme de sa région. Il ne faut voir en cela rien de péjoratif car sur le plan intellectuel, il s'est parfaitement adapté au contexte international. Le lien très net qui le relie à sa terre natale lui a permis de conserver vis-à-vis de l'art une attitude qui a guidé son oeuvre. Geys est un non-conformiste dans le sens où il connaît très bien le monde de l'art mais le rejette ouvertement. C'est dans cette attitude à contre-courant qu'il puise son énergie créatrice. A l'instar de son ami issu de la même région, l'auteur Walter van den Broeck (
o1941), qui en 1970, écrivit sur lui un livre,
362.880 X Jef Geys, il se caractérise par un fort engagement social. Il se définit lui-même ‘contre et à l'écart de la mode’, fustige les événements artistiques prétentieux, combat les institutions artistiques officielles qui imposent au public des jugements de valeur sans réplique,
Jef Geys, ‘Middelgrote structuur’ (Structure moyenne), (d'après ‘Villa Hoffmann’ par Joseph Fischer, Budapest, 1934), partie du projet ‘Biennale de Sāo Paulo’, 1991.
et tourne en dérision tout ce qui touche au monde de l'art.
Pourtant, malgré son opposition et ses productions fort diverses, il suit une ligne infiniment logique dans tout ce qu'il offre. De 1947 à aujourd'hui, il a essayé, de manières les plus diverses et avec les moyens les plus variés, d'exprimer sa grande préoccupation: placer l'art au niveau de l'homme de la rue, l'introduire dans la vie quotidienne en se servant de petits faits de tous les jours. Profitant de sa fonction de professeur d'éducation artistique dans une école communale, il montrait à ses élèves des oeuvres d'artistes célèbres et leur demandait de réaliser quelque chose en s'en inspirant au sein d'un travail de groupe. Plus tard, il suivit attentivement sur une longue période un jeune coureur cycliste amateur, photographiant et relatant par écrit toutes ses attitudes et ses performances afin d'étudier ce qui se passait dans le cerveau du jeune homme. Il a créé dans la nature des situations qui lui ont permis d'extrapoler les activités quotidiennes de l'horticulteur ou du jardinier en une forme d'art conceptuel. Il a tourné de grandes figures richement colorées, en bois lisse, semblables à des quilles, symboles satiriques de l'image séduisante de LA femme, des intérieurs et d'une façon générale de la suresthétisation du cadre de vie. En 1970, on lui proposa de réaliser une exposition pour le Koninklijk Museum voor Schone Kunsten (Musée royal des Beaux-Arts) d'Anvers et il suggéra de faire sauter le musée, montrant par là sa volonté d'abattre symboliquement les structures de la vie culturelle.
Grâce à son engagement, son non-conformisme et la place tout à fait à part qu'il occupe au sein de la vie artistique flamande, il fut en 1991 désigné pour réaliser un projet pour la Biennale de Sāo Paulo. L'oeuvre créée en collaboration avec l'architecte Guy Mertens vit le jour sous la forme de 18 structures en bois blanc inspirées d'autant de bâtiments qui avaient frappé l'artiste et l'architecte d'une manière ou d'une autre. Ces structures furent réalisées en trois échelles différentes. L'une d'elles fut construite à grande échelle à l'extérieur de la Biennale et sert aujourd'hui de centre culturel, 18 structures de taille moyenne furent montées dans le bâtiment de la Biennale et 18 autres de plus petit format fu-