La Cour de Cassation relaxe un violeur
C'est la fureur des associations féministes et des juristes que vient de s'attirer la Cour de Cassation à la nouvelle que cette instance judiciaire suprême des Pays-Bas a prononcé la relaxe d'un homme qui s'était rendu coupable de viol dans le cadre d'une liaison suivie non conjugale. Selon le juriste Van Maarseveen, cette instance a rendu un arrêt ‘barbare’, inspiré par des arrière-pensées ‘sexistes’. L'attaque de Van Maarseveen contre les juges était en outre très personnelle et de ce fait hautement inhabituelle. Naturellement, les juges se gardèrent bien de répliquer, leur code de bonne conduite leur interdisant de réagir aux critiques soulevées par leurs décisions et particulièrement quand ces critiques sont aussi personnelles que dans le cas présent. La Cour de Cassation avait confirmé une sentence du Tribunal d'Amsterdam qui avait déjà précédemment relaxé le prévenu en question, la cour n'étant pas convaincue qu'après des années de rencontres - ‘une longue alternance d'attraction et de rejet’ - l'homme était encore capable de comprendre que la femme voulait définitivement mettre un terme à leurs relations.
La sentence ayant été portée en cassation, au terme de ses attendus, la Cour ne trouva pas matière à l'infirmer. La Cour de Cassation ne s'est pas prononcée sur le fond.
Plusieurs juristes prirent la défense de la Cour de Cassation. Ils voyaient dans les critiques de Van Maarseveen un coup sous la ceinture et estimaient que la sentence des juges n'était nullement inspirée par une tournure d'esprit sexiste mais que c'étaient de pures considérations techniques de procédure qui leur avaient dicté la confirmation de l'arrêt de la juridiction inférieure.
Il est de fait toutefois que cette affaire a précipité le débat sur la permissibilité du viol dans le cadre du mariage ou d'une liaison suivie. Au Parlement, on posa des questions écrites au ministre de la justice, Korthals Altes, où l'on exprimait la crainte que cet arrêt de la Cour de Cassation ne fonde une jurisprudence qui comporterait que les hommes puissent faire ce que bon leur semble. Le ministre coupa court à ces craintes en faisant remarquer qu'il est également possible d'inscrire dans le code pénal des sanctions contre le viol dans le cadre du mariage et de relations similaires. L'article actuel déclare: ‘Celui qui par violence ou menaces force par voies de fait une femme à avoir avec lui commerce de la chair en dehors du mariage, encourt, en tant coupable de viol, une peine maximale de douze ans de prison’. Le ministre propose de supprimer les mots ‘en dehors du mariage’. Selon le ministre il faudra procéder cette année encore à la modification de la loi sur ce point.
Paul van Velthoven
(Tr. J. Fermaut)