F. Springer
écrivain et diplomate
Ce n'est que depuis une dizaine d'années que l'auteur néerlandais F. Springer est connu et reconnu aux Pays-Bas. En effet, dans une enquête de l'hebdomadaire Vrij Nederland du 27-12-1977, il s'avérait que F. Springer était un écrivain méconnu. Son oeuvre modeste, cinq ouvrages parus entre 1962 et 1977, a été découverte bien après leurs dates de parution. Mais les choses ont changé, public et critiques ont accueilli avec enthousiasme ses livres réédités depuis en ‘Salamander’, le livre de poche néerlandais. C'est surtout Bougainville (1981) qui a remporté un succès éclatant: ce roman a bénéficié de six rééditions en deux ans et il fut couronné en 1982 par le prix littéraire F. Bordewijk.
Aujourd'hui c'est aux Français de faire la connaissance de Bougainville dont la traduction vient de paraître, ainsi que de son auteur, dont nous esquissons ici la vie et l'oeuvre.
F. Springer est le pseudonyme de Carel Jan Schneider, né en 1932 à Batavia dans les Indes néerlandaises (actuellement Jakarta en Indonésie). Jusqu'en 1945 la famille Schneider vit sur l'île de Java, à Batavia d'abord, puis Malang et enfin Bandoeng, où la mère et les trois fils sont internés dans un camp japonais, le père étant déporté en Birmanie. Ce sont les expériences vécues dans ce camp, mais aussi son enfance aux Indes, les souvenirs heureux du ‘Tempo Doeloe’, le bon vieux temps, qu'il évoquera dans les romans Tabee, New York (Salut, New York, 1974) et Bougainville (1981). Après la guerre, la famille Schneider est rapatriée aux Pays-Bas où Carel fréquente le Gymnasium (lycée classique) puis, sans grande conviction, fait des études de droit à Leyde. Plutôt que de songer à une carrière juridique, il préfère s'engager, en 1958, comme aspirantcontrôleur en Nouvelle-Guinée, où il passe quatre années à sillonner les territoires à peine explorés et à cette époque encore sous l'autorité coloniale néerlandaise. Durant cette période il écrit, sous le nom de plume F. Springer, Bericht uit Hollandia (Message de Hollandia, 1962), trois nouvelles qui, écrites à la première personne, relatent les expériences de contacts parfois difficiles avec la population autochtone et les autres Néerlandais vivant sur l'île. 1962 marque l'indépendance de la Nouvelle-Guinée et Schneider est obligé de rentrer au pays où il décide d'embrasser une carrière diplomatique. Le consulat de New York est en 1964 le premier de toute une série de postes qu'il
occupera aux quatre coins du monde. Dans Tabee, New York, écrit à Dacca en 1974, sont évoqués ses activités consulaires, bals, cocktails, aide aux Hollandais en détresse, ainsi que les souvenirs nostalgiques de son adolescence aux Indes. De New York Schneider est muté à Bangkok, où il écrit Schimmen rond de Parula (Ombres autour du Parula, 1966), et De gladde paal van macht (Le mât de Cocagne du pouvoir, 1969). Si les oeuvres précédentes contiennent d'évidents éléments autobiographiques et ont pour théâtre un endroit précis, celles-ci, bien qu'inspirées de ses expériences de diplomate, se déroulent dans un cadre fictif et racontent le conflit qui oppose les indigènes, avec leurs traditions ‘barbares’ et pratiques rituelles sanglantes, aux idées des pacificateurs.
Après avoir passé trois ans à Bruxelles auprès de l'OTAN, Schneider part en 1971 au Bangladesh, qui fournit le cadre de Bougainville (1981). De 1974 à 1977 il est en poste aux Pays-Bas, mais effectue un grand nombre de missions à l'étranger. Dans Zaken overzee (Affaires d'Outre-Mer, 1977), le narrateur observe avec acuité et ironie les vicissitudes de la vie de diplomate. En 1977, il est nommé à