l'âge d'or des charbonnages wallons était définitivement révolu.
Dans la deuxième partie de son livre, Fonteyn décrit la migration de la main-d'oeuvre flamande vers l'industrie wallonne. Entre la fin du xviiie siècle et jusqu'à la seconde moitié du xxe, la Flandre comptait parmi les régions les plus pauvres d'Europe. De larges pans de la population y vivaient dans la pauvreté et y connaissaient la faim. De grands groupes de Flamands migrèrent vers la Wallonie plus prospère. (La consultation des annuaires du téléphone des villes wallonnes laisse apparaître des colonnes entières de noms flamands.) Ces populations étaient surtout employées dans les mines mais travaillèrent aussi à la construction du réseau ferroviaire et au creusement des canaux. L'accueil réservé à ces migrants n'était pas des plus chaleureux; ils étaient l'objet de mépris, parfois de sarcasmes. Le cabaret wallon cultivait même une spécialité dite d'‘imitations flamandes’, un genre en soi. Une raison possible de ce jugement négatif sur les ouvriers flamands était que la plupart d'entre eux n'avaient aucune qualification, tandis que, dans l'ensemble, les Wallons étaient des ouvriers qualifiés. Ce que Fonteyn trouve pire, c'est que de très nombreux Wallons conservent cette opinion sur les Flamands et que, aujourd'hui encore, les clichés ont la vie dure.
Fonteyn s'arrête aussi un moment sur ce groupe non négligeable de paysans flamands qui, au sortir de la Première Guerre mondiale, se sont installés en Wallonie pour y prendre en main une large part de l'agriculture. L'auteur cite même un entrepreneur wallon qui allait jusqu'à parler de flamandisation de l'agriculture wallonne. Un autre point intéressant concerne la vie associative flamande qui se mit alors, et vraisemblablement sans entraves, à fleurir en Wallonie. De grandes organisations flamandes (pensons au Davidsfonds) y avaient de très prospères sections. Après le premier conflit mondial et plus encore après 1945, la vie culturelle flamande connut une période plus difficile en Wallonie. L'une des dernières associations flamandes à subsister, Band (Le Lien), rassembla à une certaine époque pas moins de 10 000 familles, mais cessa d'exister en 2008.
Dans Vlaanderen, Brussel, Wallonië: een ménage à trois, Guido Fonteyn utilise largement son érudition relative à l'histoire de la région. Il pimente son récit d'anecdotes étonnantes, parfois révoltantes. Il se laisse cependant quelquefois entraîner par ses connaissances visiblement inépuisables jusqu'à perdre le fil conducteur. Un responsable d'édition vigilant lui aurait été d'un grand secours. Quoi qu'il en soit, Guido Fonteyn reste indéniablement en Flandre l'une des principales sources de connaissances au sujet de la Wallonie. Il n'est que temps que de jeunes auteurs flamands lui emboîtent le pas car une information réciproque de bonne qualité ne peut qu'aider à l'amélioration des relations.
dirk van assche
(tr. chr. deprès)
GUIDO FONTEYN, Vlaanderen, Brussel, Wallonië: een ménage à trois, EPO, Anvers, 2014, 192 p. (ISBN 978 94 91297 60 1).