Pierre Vlerick
Ou l'abstraction intimiste
Dans l'actuel débat qui oppose les tendances les plus contradictoires de ce qu'il est convenu d'appeler l'Abstrait, Pierre Vlérick fait figure d'intimiste. C'est à un monde familier qu'il demande les suggestions autour desquelles s'ordonne son art. La série de toiles aux tonalités fraîches, fluides et nuancées qu'il expose en ce moment le prouve. Nous nous trouvons en présence de tableaux finement épanouis dans la sensibilité, évoquant l'impulsion de la joie, loin de toute intention de heurt et de tout délire d'improvisation. En larges touches emues et délicates, ce peintre gantois, de la génération qui atteint maintenant la quarantaine, y transpose allusivement, dans une sorte d'hymne à la vie, la sensation des atmosphères végétales, l'impression visuelle des feuilles, des fleurs, des fruits, des coulées de soleil. Leur lurrrinosité légère et changeante, dont le registre s'étend des tonalitës pleines aux transparences fugaces, semble naturellement se poser sur les mouvements ondoyants et imprécis qu'il dégage des formes concrètes. Le spectateur ne s'en apercevraitil pas, les titres même des oeuvres l'invitent à reconnaïtre en cellesci comme le symbolique appel d'une telle inspiration.
C'est la conception acquise au cours d'une longue évolution durant laquelle Vlérick a lentement éprouvé et développé le langage souple et frémissant qu'est le sien aujourd'hui. Depuis ses premières manifestations qui remontent à vingt ans d'ici, il s'est élevé progressivement vers cet univers intérieur qui transcende le propos figuratif, encore émergent dans son exposition de novembre 1960. Semblable ferveur artistique ne se conçoit qu'au service d'une authentique conviction picturale, servie autant par la sincérité des sentiments ressentis devant la nature que par le souci de les dégager des données visuelles immédiates.
Chez Vlérick, le choix des valeurs de tons, le sens de leurs rapports et de leurs modulations, certaine tendresse qui en émane rejoignent un niveau de perception où se discerne le souvenir de Bonnard. Si forte que soit la rupture marquee par le détachement du sujet figuré, sa peinture ne se situe pas moins sur ce terrain d'influence. Il ne faut d'ailleurs pas l'interroger beaucoup pour qu'il reconnaisse cette affinité et avoue, fier de pareille généalogie, qu'il s'est découvert grâce a l'admiration qu'il ne cessa de porter au maître du Cannet. Et