De Franse Nederlanden / Les Pays-Bas Français. Jaargang 1996
(1996)– [tijdschrift] Franse Nederlanden, De / Les Pays-Bas Français–
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Boulogne, Calais, Dunkerque au Moyen Age
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Flandre est rattachée dès 1384. C'est dans ce monde en pleine gestation que le petit port de Dunkerque connaissait depuis sa création un premier essor commercial. Alors, cette zone côtière à la rencontre de trois entités territoriales s'intégrait parfaitement dans la géostratégie de ce Moyen Age finissant ‘où le cadre était en train d'éclater’ pour reprendre l'expression de Michel MollatGa naar voetnoot(5) et où l'espace maritime tiendrait une place fondamentale dans les relations internationales à venir. Une telle évolution dans le temps et dans l'espace méritait qu'on s'y attardât davantage. | |
Le privilège de l'âgeIndéniablement, Boulogne s'impose dans l'histoire dès l'Antiquité par rapport à ses voisines, et pour cause, le front littoral n'est pas encore constitué. Certains termes tels que le Portus Itius mentionné au livre V de la Guerre des Gaules rappellent cette période; c'est de là que serait partie la première expédition de César dans l'île de Bretagne dès 55 avant notre ère, puis une seconde en 54 avec plus de 800 vaisseaux.Ga naar voetnoot(6) L'intérêt de Boulogne s'est accru avec Caligula qui la dote de la Tour d'OdreGa naar voetnoot(7) après un projet de débarquement en Bretagne avorté, sur le rivageGa naar voetnoot(8) de Gesoriacum même, la ville basse, que l'on oppose dans les textes latins à Bononia, la ville haute (travaux et enceinte fortifiée aux IIe-IIIe siècles après J.-C.).Ga naar voetnoot(9) Mais c'est surtout parce que plusieurs voies stratégiques - dont une reliant Thérouanne, Arras, Cambrai, Bavay et Cologne, et une autre, Amiens, Reims, Milan, Rome - convergeaient vers l'estuaire de la Liane qu'une flotte permanente nommée la Classis Britannica installa sa base.Ga naar voetnoot(10) C'est du port de Gesoriacum que les liaisons militaires et commerciales s'établirent avec la province nouvellement conquise. Au Bas-Empire, la Bretagne n'a plus tant d'intérêt pour le pouvoir romain si bien que Boulogne perd quelque peu son attrait d'autant plus qu'elle subit, du moins Gesoriacum, les raids barbares au cours du IIIe siècle, comme le souligne Claude SeillierGa naar voetnoot(11); cette opposition entre la ville haute et la ville basse reviendra souvent dans l'histoire de ce centre urbain, mettant en valeur le relief de la cuesta crétacée par opposition à la platitude de la plaine maritime flamande où se situeront ses voisines. En outre, si la romanisation n'a jamais été très poussée de l'estuaire de la | |
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Somme jusqu'au haut Rhin, il n'en a pas été de même le long des côtes où l'infrastructure portuaire centrée sur Boulogne avait été complétée au cours du IVe siècle par le dispositif du litus saxonicumGa naar voetnoot(12); aussi, cet ‘îlot de romanité devait être romanisé à tout prix’ et c'est ainsi que s'intègre l'action de saint Wictrice à la fin du IVe siècle et au début du Ve siècle.Ga naar voetnoot(13) Quel en a été le véritable impact? La réponse semble délicate mais toujours est-il que deux siècles plus tard Omer fut d'après son biographe qualifié ‘d'évêque de Boulogne et de l'oppidum de Thérouanne’ de 639 à 667.Ga naar voetnoot(14) Un problème surgit très rapidement de cette double titulature; en réalité, les successeurs d'Omer résidèrent tous à Thérouanne qui devint le véritable centre de l'évêché même si au IXe siècle, Hincmar, archevêque de Reims, considérait juridiquement Bononia comme la tête naturelle de la circonscription. M. Rouche précise que cette antique cité épiscopale aura une cathédrale Notre-Dame au Moyen Age, mais pas d'évêque, cas assez uniqueGa naar voetnoot(15) sur la plan religieux. Boulogne connaît un renouveau économique avec la ‘renaissance carolingienne’Ga naar voetnoot(16), Charlemagne s'y rendant en 811.Ga naar voetnoot(17) Pourtant à une trentaine de kilomètres plus au sud, Quentovic s'impose toujoursGa naar voetnoot(18); mais au IXe siècle, la tourmente scandinave vient ravager ce centre et tout l'arrièrepays boulonnais. Une fois de plus, Bononia, la ville haute, est épargnée. Malgré les troubles, en 935Ga naar voetnoot(19), Louis IV d'Outremer, après un exil, rentre d'Angleterre par Boulogne, ce qui témoigne que ce port était le lieu privilégié de passage avec l'Angleterre. Durant cette période confuse où le morcellement du pouvoir était réel, on voit en Occident se constituer des châtellenies de tailles très variables. Le premier comte de Boulogne aurait-il été ArnoulGa naar voetnoot(20)? En tout cas, ses successeurs auraient possédé la ville, plus une bande côtière (dont on aurait distrait le Ternois et Guînes)Ga naar voetnoot(21). Tout au long du XIe siècle, les Boulonnais vivent une relative expansion en mer du Nord puisqu'il y a diffusion de la monnaie comtale, les comtes de ville ayant des ambitions même de l'autre côté du DétroitGa naar voetnoot(22)! Et avec la comtesse Ide, la ville se voit dotée de nombreux édifices religieux, environ une dizaine (alors qu'au VIIe siècle, à l'époque d'Omer, il y en avait environ six.Ga naar voetnoot(23) La ville au XIIe siècle nous est bien connue du moins dans certains domaines précis; ce qui frappe c'est l'absence d'aspects portuaires | |
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![]() Plan de Boulogne-sur-Mer du Ve au XIe siècle dans Histoire de Boulogne-sur-Mer, dir. Alain Lottin.
et économiques selon A.D. Kapferrer. Or, M. Rouche insiste lui aussi pour la période antérieure sur le ‘rôle plus stratégique, plus politique qu'économique’. N'est-ce pas cette absence d'économie véritablement structurée qui a empêché un véritable ‘décollage’ de la cité maritime? La société boulonnaise aime l'aventure; c'est pourquoi le nom de Boulogne est déjà célèbre en Terre sainte, dans l'Empire, en Angleterre, en Écosse, au Portugal et même en Asie Mineure grâce à ses marins.Ga naar voetnoot(24) N'oublions pas que Baudouin, comte de Boulogne sera roi de Jérusalem après Godefroy de Bouillon. Au début du XIIe siècle, un pirate boulonnais nommé Guinemer ne sévit-il pas en Méditerranée? L'importance de la | |
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piété ne signifie pas que les querelles religieuses sont absentes de la vie quotidienne: de fréquents problèmes surgissent entre les séculiers et les réguliers des campagnes environnantes et de Boulogne qui se manifestaient par trop dans les conflits féodaux de l'époque. Il faut y ajouter les différends entre Notre-Dame de Boulogne, et le chapitre Saint Wulmer d'une part, et l'hôpital de Boulogne Sainte Catherine d'autre part, qui, après l'intervention de l'évêque de Thérouanne se terminent très souvent en faveur de Notre-Dame, laquelle jouit déjà d'un prestige indéniable et représente un apport financier intra-muros. Enfin, avec la croissance démographique constatée dans l'ensemble de l'Occident par de nombreux historiens, la basse ville s'accroît sur les rives de la Liane. Apparaissent alors des couresses (lieux de saurissage du hareng) de pêcheurs, seuls lieux d'activité économique dont il soit fait mention; c'est aussi là que se manifestent les révoltes, voire la violence à l'image de Mathieu d'Alsace ‘jeune, violent et convoiteux’ selon les chroniqueurs.Ga naar voetnoot(25) Chose surprenante, la charte de la ville daterait des environs de 1203Ga naar voetnoot(26), charte scellée et rédigée peut-être à HardelotGa naar voetnoot(27); cette fondation tardive peut étonner quand on pense à la précocité de Boulogne dans l'histoire. De plus, le fait malheureux que le comte de Boulogne Renaud de Dammartin participa à la coalition menée contre le roi de France Philippe Auguste à BouvinesGa naar voetnoot(28), en 1214, devait porter quelque peu préjudice à la cité et au comté, tombant alors sous la tutelle française.
Pendant ce temps, deux hameaux de pêcheurs attendaient leur entrée dans l'histoire; situés en Flandre maritime, ces deux bourgades avaient bien des similitudes: deux havres initiaux au milieu de cordons dunaires offrant des abris limités aux embarcations lors des tempêtes renommées par leur intensité en mer du Nord, sur de petits estuaires, la Neuna ou la Gersta. Le travail et la ténacité de l'homme du Blootland lui permettront d'élargir son horizon et de gagner des parties sur la mer. Il lui faudra lutter contre l'eau en cherchant à résoudre le problème de l'invasion toujours possible de la mer au-delà du cordon dunaire lors des tempêtes, notamment aux périodes d'équinoxes. Ce sera le rôle des digues, du drainage des eaux et de leur évacuation à l'aide d'éclusettes ainsi | |
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que de tout un réseau de watergangs géré de façon de plus en plus administrative et structurée, parfaitement étudié par A. VerhulstGa naar eind(29), palliant la double inclinaison topographique de la Flandre maritime.Ga naar eind(30) Cette action s'intègre parfaitement aux vagues de défrichements et a permis à G. Fourquin de les comparer aux turcies de la Loire ou à la poldérisation en Allemagne du Nord.Ga naar eind(31) Les mentions sont rares aux XIe et XIIe siècles et les quelques fois où Calais et Dunkerque sont citées concernent la pêche et son indépendance vis-à-vis des châtellenies de l'arrière-pays, car les paroisses littorales relevant de Saint-Bertin ou de Saint-Winoc doivent verser la dîme du hareng provoquant la colère des pêcheurs.Ga naar eind(32) Il faut insister sur le rôle joué par les comtes de Flandre, Mathieu, et surtout Philippe d'Alsace, qui, en fondant des avant-ports et des villes sur le littoral, montrent la préoccupation du pouvoir seigneurial envers l'économie, contrairement aux idées reçues.Ga naar eind(33) Après une première vague de fondations qui a vu naître Gravelines et Nieuport vers 1163, une seconde vague concrétise la politique économique comtale puisqu'on assiste à l'apparition de Damme (1180), Calais (vers 1181), Biervliet (1183) et Dunkerque (1183).Ga naar eind(34) Si, à partir de la fin du XIIe siècle, le problème de l'eau, en partie réglé, reste cependant sous-jacentGa naar eind(35) (tempêtes toujours fréquentesGa naar eind(36) inondant l'arrière-pays, ensablement des estuaires, marais du Pays de l'Angle, au sud-est de Calais, ou des Moëres, au sud-est de Dunkerque), l'eau demeure un atout stratégique même encore au XVIIe siècleGa naar eind(37)! Enfin, progressivement, les cités maritimes flamandes vont tenter de se détacher de la tutelle des châtellenies de l'hinterland et vont s'imposer à un commerce maritime croissant à la fin du Moyen Age par rapport à Boulogne qui reste durant cette première période le passage privilégié vers l'Angleterre. | |
Une évolution contrastéeCette seconde période qui débute avec les chartes de fondation de nos cités maritimes et s'achève avec la prise de Calais en 1347 souligne une nette évolution du littoral et une modification dans les rapports entre les trois ports. Ce qui surprend, c'est | |
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l'abondance des sources manuscrites pour Calais, ce qui fait dire à A. Derville qu'il voyait ‘apparaître la ville comme dans une éprouvette’.Ga naar eind(38) En revanche, A.D. Kapferrer estime les sources pour Boulogne assez limitées alors qu'elles font cruellement défaut pour Dunkerque, à l'exception des sources diplomatiques.
Ainsi, pour Boulogne, on peut considérer le XIIIe siècle comme un ‘rendez-vous manqué’ avec l'histoire; nous savons que Philippe Hurepel, comte de Boulogne, en épousant Mahaut d'Artois, fait passer le comté dans l'Artois et renforce la tutelle royale sur la cité.Ga naar eind(39) A la mort de la comtesse Mahaut (en janv. 1259), des enquêtes seront menées par les officiers royaux afin d'établir les droits respectifs des seigneurs et de la ville; le nouveau comte Robert, également comte d'Auverge, obtient le comté de Boulogne pour une somme de 40 000 livres avec l'accord du Parlement de Paris! Mais le comté devait perdre le Calaisis. Par conséquent, le comté de Boulogne est davantage sous tutelle royale française et perd une partie de son influence. Quelques sources nous renseignent sur la vie urbaine (police, hygiène, voirie,...), sur l'aménagement des châteaux de Philippe Hurepel à Hardelot, à Boulogne et à Calais même, sur l'édification d'un beffroi ou bancloque, fierté de la bourgeoisie; tous ces éléments affichent une relative prospérité urbaine et ce n'est pas sans raison que l'on parle avec nostalgie de la période 1223 à 1259 qui a permis à ‘la ville de connaître un essor économique et démographique sans grandes secousses’ selon A.D. Kapferrer. Boulogne conserve toutefois son rôle de passage privilégié vers l'Angleterre puisque plusieurs hauts dignitaires y seraient passés (le roi d'Angleterre Henri VIII en 1254, un légat du pape en 1264, Saint Louis plusieurs fois selon les chroniqueurs...), et son pèlerinage fait la renommée de la ville. A ce sujet, Philippe le Bel venu en 1304 promet de donner 300 livres parisis par an. Et pourtant le rôle économique (pas de changeur, pas ou peu de dynasties connues de marchands à l'exception des Le Moiste), le rôle portuaire se révèlent à peine dans les archives consultées à ce jour: on sait que le port est peu aménagé, qu'aucune jetée - semble-t-il - n'est encore édifiée et que le fond de l'estuaire de la Liane est toujours difficilement accessible. Seule la pêche reste l'activité économique | |
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essentielle et cette société urbaine ressemble davantage à une société rurale. Plusieurs éléments peuvent justifier ce retard, et notamment que Boulogne est excentrée par rapport à tous les grands axes économiques liant la Flandre à l'Artois, à la Champagne, à l'Ile-de-France, vers l'Empire et l'Italie et qu'elle est dépourvue d'une longue voie fluviale navigable vers l'arrière-pays immédiat sans grande richesse.Ga naar eind(40) De plus, au XIIIe siècle, Montreuil est encore une ville royale et drapante, Saint-Omer est prospère et ses draps y sont célèbres. Ainsi, cet isolement économique ne fait que renforcer l'isolement géographique (boutonnière du Boulonnais).
A la même époque, après une fondation récente, Calais allait connaître une période d'expansion rapide et s'imposer davantage sur le littoral; en effet, dès 1210, Calais obtenait sa séparation de la Terre de Marck. Pourtant, la keure urbaine est inspirée de la keureGa naar eind(41) rurale, antérieure, donc du Calaisis. Comme l'a souligné à juste titre A. Derville, la compréhension des institutions urbaines passe par les institutions rurales en Flandre maritimeGa naar eind(42) car, ne l'oublions pas, toutes les villes neuves, Gravelines, Dunkerque, Nieuport, créées à la fin du XIIe siècle cherchent leur indépendance par rapport aux entités territoriales plus anciennes telles que les châtellenies de Bourbourg, Bergues ou Furnes.Ga naar eind(43) Dans le cas calaisien, ce qui est frappant, c'est la rapidité du processus. De la même façon, en 1265, le Calaisis est distinct du comté de Boulogne, ce qui confirme l'acquisition nouvelle de son indépendance.Ga naar eind(44) Dès le XIIIe siècle, Calais se situe à la rencontre de zones d'influences. L'apport de la Flandre au niveau institutionnel est perceptible à travers les termes ‘keure’, ‘coremans’ ... qui ne trompent pas. De même, l'étude sur l'onomastique calaisienne de M. Gysseling et de P. BougardGa naar eind(45) met en évidence une forte immigration vers le Calaisis dont l'origine géographique s'étend à l'ouest de l'Aa, ce qui prouve l'attraction de la cité maritime dans un rayon d'environ 50 kilomètres, déchargeant par conséquent l'Artois de son surplus démographique. Pourtant, notre attention doit être retenue par les chroniques de l'époque qui présentent Calais comme une escale de plus en plus fréquentée par la flotte du roi dirigée contre les Flamands ou | |
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![]() Calais (1228), sceau de la ville. Pris sur un relief en cire déposé aux Chartes d'Artois dans les Archives de la préfecture du Pas-de-Calais.
comme une base navale pour les opérations conduites contre l'Angleterre. En devenant un point de passage privilégié entre l'Angleterre et le continent, Calais s'impose en tant que port rival de Boulogne dont la fonction ancestrale était établie depuis l'Antiquité; même, Wissant garde un rôle de passage non négligeable vers l'Albion, emprunté davantage par les pèlerins et les ambassadeurs. Calais s'est donc particulièrement inquiétée de l'état du port comme l'attestent les dépenses régulières en ce sens, parfois très importantes, dit A. Derville, surtout en 1268 et en 1286. Tous les vingt ans, de gros frais étaient engagés pour l'entretien du port qui présentait déjà probablementGa naar eind(46) une bonne structure: un chenal entre deux jetées, deux quais d'accostage, un bassin pour ‘nefs pescheresses’ et le Grand Paradis pour ‘nefs qui vont en marchandise’. Calais avait déjà compris l'intérêt de sa localisation face à Douvres, et annonce ainsi les orientations futures de la cité; celle-ci se dote d'imposantes fortifications à partir de 1228 après que Philippe Hurepel se fut construit un château dans la partie nord-ouest du site et des hallesGa naar eind(47),... Tous ces travaux nécessitent de la part de l'échevinage un effort particulier; c'est ainsi que pour éponger la dette flottante, donc à court terme, l'emprunt était le plus usité sous des formes diverses: emprunt forcé, sans intérêt, ou intérêt, à terme ou à manaie.Ga naar eind(48) | |
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Certes, les représentants urbains évitent de recourir à accroître l'imposition locale, ce qui pouvait provoquer des révoltes internes; cependant, la situation semble critique et force est de constater qu'en 1298, le soulèvement a été important, ce qui a permis d'appréhender avec précision la réalité calaisienne, grâce à une documentation sérielle fort intéressante bien que lacunaire.Ga naar eind(49) Mais l'étude des comptes n'amène pas toujours les historiens aux mêmes conclusions. D'une part, P. Bougard et C. Wyffels considèrent la situation calaisienne en 1300 désespérée, la ville se dirigeant vers une ‘faillite inéluctable’.Ga naar eind(50) De plus, celle-ci semble particulièrement endettée vis-à-vis de riches Arrageois, voire d'AudomaroisGa naar eind(51), ce qui la rend dépendante de l'arrièrepays. D'autre part, A. Derville estime qu'il y a richesse intra muros, car, pour lui, la dette a été en grande partie épongée en 1294, certaines activités telles que la pêche prospérant et selon la conjoncture, les pirates calaisiens faisant leur apparition dans les chroniques.Ga naar eind(52) Il avance donc le nombre de 14 000 habitants en 1300 à Calais tandis que P. Bougard et C. Wyffels ne l'évaluent qu'à 7 000 âmes à la même date.Ga naar eind(53) Plusieurs éléments cependant nous incitent à la modération: la dette est encore élevée en 1297Ga naar eind(54), la révolte de 1298 fut suivie d'une amende imposée à la ville de 20 000 livresGa naar eind(55), ce qui a permis à nos deux derniers auteurs d'employer le terme de ‘déconfiture’.Ga naar eind(56) Il faut reconnaître que beaucoup de villes étaient alors endettéesGa naar eind(57); le tout étant d'évaluer l'endettement par rapport à la population (taillable ou non) de chaque cité afin d'établir une étude comparative et proportionnelle de la dette entre les différents centres. Mais, dans ce cas, n'atteignons-nous pas les limites de l'histoire quantitativeGa naar eind(58)? Et qui peut avec certitude dénombrer les populations urbaines de cette époque? Autre élément qui ne peut que limiter la prospérité calaisienne et les relations de Calais avec l'Audomarois et l'Artois, ce sont les voies de communications, comme le dit A. Derville lui-même; celles-ci sont déplorablesGa naar eind(59) et les voies d'eau ne permettent que le transport par petites embarcations.Ga naar eind(60) Par conséquent, Gravelines demeure jusqu'au XIVe siècle le passage obligé pour le trafic le plus lucratif vers Saint-Omer; de facto, Calais joue alors le rôle de port de redistribution, ce qui ne l'a pas empêché de | |
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s'imposer sur le littoral grâce à sa localisation privilégiée face à l'Angleterre, mais également parce que ses voisines immédiates Wissant et Gravelines ont successivement connu de graves problèmes d'ensablement. Enfin, A. Derville voit dans la cité maritime un centre déjà prépondérant qui joue un rôle international - selon lui- dans la première moitié du XIVe siècle (présence de Castillans, Poitevins, Bretons, Normands, Anglais, Ecossais) même si ce dernier auteur reconnaît que la population a dû baisser durant cette période.Ga naar eind(61) Pourtant, cette prospérité exceptionnelle selon nous n'est-elle pas liée à la fixation provisoire de l'étape des laines à Saint-Omer vers 1313-1314 et vers 1320-1324? En outre, n'est-il pas surprenant que pour un centre international d'une telle importance une seule mention ait été faite le concernant, dans l'excellente étude de P. Dollinger sur la HanseGa naar eind(62)? Prospérité calaisienne, au début du XIVe siècle, cela semble acquis par rapport à Boulogne et à Dunkerque; mais dans quelles proportions? L'état actuel des recherches, voire des documents ne nous permet pas de le préciser et incite une fois encore à la modération comme nous le prouvent déjà des études en cours.Ga naar eind(63)
Durant la même période, Dunkerque, avant la grande dépression du bas Moyen Age, a évolué depuis sa fondation plus discrètement que Calais. Peu de sources manuscrites contemporaines nous renseignent à ce sujet, la plupart de celles-ci étant diplomatiques quand elles existent. Depuis sa création analogue ou presque à celle de Calais, la ville, dès 1226Ga naar eind(64), possède un sceau et une keure au moins dès le XIIIe siècle mais la date reste incertaine à ce jour.Ga naar eind(65) Le port et la ville changent de physionomie: le stadhuys est édifiéGa naar eind(66), un premier lieu de bienfaisance (distribution de vivres, d'aumônes, de vêtements...), la charité du Saint Esprit, est créé aux environs de 1270Ga naar eind(67) et, enfin, deux jetées sont construites au niveau du port aux environs de 1230 sous le seigneur Godefroy de Condé.Ga naar eind(68) Par rapport aux activités signalées dans les documents, seule la pêche se manifeste comme l'activité essentielle de la ville représentée sur le sceau cité antérieurement. Ajoutons qu'en 1253 passe au péage de Bapaume un convoi de harengs caqués, de maquereaux et de merlans provenant de Dunkerque en direction de Paris.Ga naar eind(69) Mais la croissance de la cité est encore | |
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assez réduite au début du XIVe siècle. Dès 1254, un différend surgit entre Bergues et Dunkerque à propos de l'HavendyckGa naar eind(70) et la comtesse de Flandre tranche en faveur de Bergues malgré les objections des Dunkerquois. De même, à la suite du traité d'Athis-sur-Orge, Philippe le Bel impose le versement d'une somme considérable proportionnelle à l'importance de chaque cité flamande; la part de Dunkerque s'élève à un peu plus de la moitié de Bergues. Notons que par rapport à Dunkerque, Gravelines ne verse que le sixième, Mardyck le quatorzième.Ga naar eind(71) Ces proportions s'expliquent par des problèmes principalement d'ensablement touchant ces deux localités qui ont connu ou connaissent pour peu de temps encore une période de relative prospériteGa naar eind(72); la maîtrise de l'eauGa naar eind(73) revient sur le devant de la scène et elle est la condition sine qua non au développement de toute cité sur le littoral flamand. Dunkerque n'a donc pas connu un développement aussi rapide que celui de Calais et l'aménagement ne s'est réalisé que progressivement. Quelles en sont alors les raisons? Tout d'abord, la localisation face à la Grande-Bretagne est ici un atout moins déterminant que pour Calais; de plus, Dunkerque change très régulièrement de seigneurs dont certains n'ont laissé qu'une empreinte minime (un dénommé Laurent ou Lorenzo, puis Godefroy de Condé, puis Baudouin d'Avesnes)Ga naar eind(74) et n'ont manifesté qu'un intérêt moindre pour la cité hormis lors de la perception des taxes sur les produits de la pêche.Ga naar eind(75) Avec Guy de Dampierre, Dunkerque retourne au comté de Flandre et s'insère ainsi dans un ensemble territorial plus conséquent. En outre, la non-appartenance à une organisation commerciale telle que la hanse flamande de Londres lui a été préjudiciable alors que Furnes, Ypres, Bergues, Bailleul, Poperinghe y adhèrentGa naar eind(76); or, la rivalité avec Bergues due à la très grande proximité géographique des deux cités s'accroît et la tutelle de la châtellenie y est plus forte qu'ailleurs.
Enfin, si Mardyck et Zuydcoote sont déjà ensablées au XIIIe siècle, GravelinesGa naar eind(77) et NieuportGa naar eind(78) sont des voisines encore très actives. De facto, la localisation semble pour l'instant quelque peu préjudiciable. | |
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![]() Plan de Calais au Moyen Age dans ‘Histoire de Calais’ (Extrait du B.H.A.C. - Cliché J. Gardy).
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Le renversement des valeursNotre troisième phase se caractérise en ce XIVe siècle par les trois fléaux classiques du Moyen Age finissant: les disettes, la peste et la guerre; notre région littorale pouvait-elle être exempte de tels maux? Les disettes de 1315-1316, dues aux déluges de pluies, eurent des conséquences indéniables sur la région: la Flandre maritime fut sans doute inondée et les récoltes perdues. Cependant, les éléments précis font défaut et seul A. Derville précise pour Calais qu'en 1318 on ne trouvait plus assez de ‘bonnes’ gens pour trouver 32 magistrats, ce qui avait amené la comtesse à permettre aux échevins de devenir ‘coremans’ et inversement.Ga naar eind(79) Pourtant, il nous faut nuancer, car les zones portuaires ont été moins touchées que les zones intérieures, ce que confirme une étude comparée entre Bruges et Ypres aux mêmes dates.Ga naar eind(80) La peste noire quant à elle est assez peu évoquée dans les archives; d'ailleurs, les monographies réalisées sur ces trois centres n'y font guère allusion. Certes, l'élément fondamental reste la guerre de Cent Ans et la Flandre est devenue dès le début du XIVe siècle un véritable enjeu au cours du conflit; c'est dire donc l'importance de la façade littorale flamande. Même si les | |
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disettes ont marqué quelque peu Calais, la ville demeure attractive, car bien fortifiée, elle intéresse beaucoup les Anglais; l'aspect stratégique devient prédominant et confère pour longtemps, même après la reconquête française, une fonction essentielle à la cité.Ga naar eind(81) La prise de Calais de 1347Ga naar eind(82) fit de la ville une plaque tournante; on parle même de ‘ville fantôme’Ga naar eind(83) puisque trois Calaisiens selon Froissart, vingt-deux selon Gilles lli Muisis sont restés intra-muros; en tout cas, c'est cet événement qui provoqua une migration importante.Ga naar eind(84) Commence alors une véritable politique volontaire de la part de la monarchie britannique; dès août 1347, le roi offre privilèges, belles maisons, mais seuls 190 preneursGa naar eind(85) pour environ 2 000 habitations se manifestent. De même, une administration sérieuse s'organise et fait de Calais une ville anglaise où cohabitent ‘soudoyés’ et ‘aldermen’. De plus, il fallait créer une économie locale et les tentatives n'eurent pas les effets immédiats escomptés (dès 1348, frappe de la monnaie de Calais et fixation de l'étape des draps). Malgré tout, en 1360, Calais était considérée comme une possession sûre: un port commode pour les troupes, une base pour contrôler le détroit et un centre d'échanges avec les Flamands ou les ports des Pays-Bas.Ga naar eind(86) C'est pourquoi, le 9 février 1363, Calais devint l'Étape de toutes les marchandises anglaisesGa naar eind(87) et une compagnie de l'Étape composée de 36 membres fut nommée par le roi.
Selon P. Contamine, quelques 300 personnesGa naar eind(88) sous Édouard IV, en majorité de Londres, se sont installés à partir de 1361 dans la place forte de Calais, commercialisant durant la brève période favorable 31 000 sacs par an en moyenneGa naar eind(89); assurément, une oligopole de marchands profita de la situation et la monnaie de Calais fut relancée. On parla même de monnaies d'orGa naar eind(90), prouvant ainsi la relative prospérité de la ‘cité des six bourgeois’. Mais n'était-elle pas qu'artificielle puisque l'activité économique était liée à la pure volonté royale? L'Etape des laines ne dura qu'une vingtaine d'années; la chute des exportations de laine vers la Flandre illustrait le sens de cette évolution liée au changement d'habitudes vestimentairesGa naar eind(91) et à la concurrence des laines plus méridionales. Cependant, il fallait garder Calais. Le libelle of | |
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English PolycieGa naar eind(92) composé en 1436, peu après la tentative menée par le duc de Bourgogne Philippe le Bon en vue de reprendre CalaisGa naar eind(93), commence par une phrase prononée par l'empereur Sigismond à Henri V lors de sa visite en Angleterre vingt ans plus tôt: ‘Douvres et Calais sont comme les deux prunelles de la domination’. Or, les Anglais ne semblent plus en avoir conscience, ils ont abandonné la maîtrise des mers; il convient donc de redresser la situation, de faire plier la Flandre. Suivent neuf chapitres traitant de la circulation des marchandises entre la Flandre et le reste du monde.Ga naar eind(94) Comme le précise P. Contamine, l'objectif était de réduire alors la Flandre (et les Pays-Bas) en tant que centres de redistribution mais aussi de fabrication des draps, et cela par le boycott et par le contrôle de la Manche au moyen d'une véritable flotte de guerre: ‘Chérir la marchandise, garder l'Amirauté’ pour rester les maîtres de la ‘mer étroite’. L'aspect stratégique a donc été déterminant sur le plan maritime et sur le plan continental; n'oublions pas que les chevauchées anglaises, souvent infructueusesGa naar eind(95), s'abattaient sur la région et que les cités voisines souffrirent de ces exactions pourtant coutumières en pleine guerre de Cent Ans.Ga naar eind(96) Aussi il n'est pas surprenant que Calais ait été une ville de garnison importante devant l'imminence latente de la menace française aux limites du Pale (zone occupée par les Britanniques)Ga naar eind(97), et la reprise des places fortes par les Bourguignons après 1435 en faisait un véritable ‘réduit’.Ga naar eind(98) Les soudoyés (officiers et soldats), au nombre de 800 puis de 500 au début du XVIe siècleGa naar eind(99), animaient le centre urbain et le meublaient car l'Étape s'était affaiblie, puis stagna après s'être effondrée à la fin du XIVe siècle. Les relations s'envenimèrent entre la garnison et les marchands de l'Étape, surtout dans la seconde moitié du XVe siècle; en effet, la monarchie anglaise, en pleine guerre des Deux Roses, rencontrait quelques difficultés pour assurer les soldes du contingent anglais qui représentaient 92% des dépenses locales de la couronne.Ga naar eind(100) N'était-ce pas devenu - comme le dit A. Derville - un ‘joyau hors de prix’Ga naar eind(101)! En tout cas, il est certain que Calais se mua en enjeu du terrorisme anglaisGa naar eind(102) et, à l'inverse comme l'a démontré D. Clauzel, source du contre-terrorisme dans la région.Ga naar eind(103) Finalement, Calais, colonie anglaise, permettait de savoir d'où | |
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partaient les chevauchées, ce qui présentait en quelque sorte ses avantages tant à la France qu'aux Etats bourguignons.
La situation calaisienne orchestra d'une certaine façon l'évolution des cités du littoral et plus précisément celle de ses voisines immédiates. Par conséquent, Boulogne se développe entre ‘guerres et trêves’, du moins jusqu'en 1416.Ga naar eind(104) En 1339, la flotte anglaise de l'amiral Morlay ayant surpris la vigilance des Boulonnais pille une fois de plus le bourg proche de la Liane et épargne la ville haute. La fièvre s'empara des marins de cette cité car ils avaient déjà participé à la bataille de l'Écluse (7 nefs et 520 hommes) et la guerre s'avérait proche avec la prise de Calais. A partir de là, le guet devint une des préoccupations obsidionales de l'échevinage; en outre, avec la peste noire, la situation n'est guère brillante puisque les comptes de bailliage de 1349 à 1351 signalent la non-perception de nombreuses amendes. L'arrière-pays, assez souvent dévasté, amène une population flottante en basse ville, ce qui inquiète particulièrement la bourgeoisie de la haute ville; en 1377, les Anglais atteignent une fois de plus le port et même après que la situation fut redevenue momentanément plus calme, les bateaux de pêche sont souvent victimes de la course. En 1415, les comptes de la cité sont presque équilibrés, mais l'assise est assez réduite et le rôle de taille, selon A.D. Kapferrer, ne concerne que 503 Boulonnais dont quatre seulement versent une somme supérieure à 40 sous! Malgré tout, la ville demeure un centre de pèlerinage important et les ducs de Bourgogne, nouveaux comtes de BoulogneGa naar eind(105) en 1417, font à leur tour, comme leurs prédécesseurs, des dons appréciables. Les documents font cruellement défaut et si la ville haute accroît ses dépenses, seules les chroniques nous apprennent que l'arrière-pays boulonnais et le bourg subissent de nouveaux ravages.Ga naar eind(106) En 1477, Louis XI décide la reconquête des villes artésiennes et picardes, et c'est la chute de Boulogne qui passe de nouveau sous la tutelle française. On parle alors d'une ville forte de remparts et de fossés, mais toujours pas du port.Ga naar eind(107) Pour Dunkerque, une source sérielle de bailliage et un ensemble de manuscrits assez épars nous ont permis d'appréhender l'histoire de la cité, surtout à partir de la seconde moitié du XIVe siècle.Ga naar eind(108) Après avoir amorcé un léger démarrage dans les années 1370, | |
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![]() Extrait de ‘Dunkerque, ville et port de Flandre à la fin du Moyen Age’ de St. Curveiller.
la ville supporte ce que nous avons appelé ‘la crise de 1386’. Cette césure correspond à la grande chevauchée partie de Calais en 1383, dirigée par l'évêque de Norwich, Henri Despencer. Cependant, dès la fin du XIVe siècle, il y a reprise commerciale que corroborent plusieurs éléments: les recettes s'accroissent, le trafic portuaire se modifie sur les plans quantitatif et qualitatif.Ga naar eind(109) Dunkerque s'intéresse désormais au grand commerce et sa non-appartenance à la Hanse ne lui est plus préjudiciable. Les Hollandais ont déjà établi un véritable monopole et d'autres acteurs interviennent sur la scène dunkerquoise à partir du XVe siècle, en l'occurrence les BretonsGa naar eind(110), les Dieppois.Ga naar eind(111) Ce développement échappe d'ailleurs en grande partie aux autochtones ou aux Flamands assez peu présents si ce n'est qu'ils restent les principaux animateurs de la vie locale intra-muros. La pêche, activité principale, fait la renommée de la ville et suscite une concurrence âpre entre les cités du littoral afin d'obtenir des privilèges sur les foires et marchés régionaux.Ga naar eind(112) Un intérêt indéniable est porté à ce centre maritime par le seigneur apanagiste, Yolande de Bar entichée de ses droits féodaux, qui, à un moment où le pouvoir central se renforce, n'hésite pas à défendre ses prérogatives jusqu'au bout.Ga naar eind(113) Son fils, Robert de Bar, sera dans | |
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![]() Vue de Dunkerque gravée par Hogenberg dans Civitates orbis terrarum, Bruin, Cologne.
ce domaine plus terneGa naar eind(114) face au prince bourguignon. Depuis 1384, l'arrivée des ducs de Bourgogne intègre la Flandre, et donc Dunkerque, dans un ensemble géopolitique beaucoup plus vaste. Avec la prise de Calais par les Anglais en 1347, Gravelines n'a pas pu devenir la première place forte flamande en raison de ses problèmes d'ensablementGa naar eind(115); ceci profita à Dunkerque qui capta le commerce de redistribution passant par l'HavendyckGa naar eind(116) vers Saint-Omer. Naturellement, les rivalités entre Bergues et Dunkerque continuent de s'accroître et à l'inverse de ce qui se passait au XIIIe siècle, cette dernière l'emporte lors des procédures judiciaires opposant les deux bailliages.Ga naar eind(117) Sous les Bourguignons, la situation se stabilise et même si l'administration centrale se renforce - les trajets de messageriesGa naar eind(118) le révèlent - tout en laissant - politique habile - une part de liberté chère à chaque ville flamande.Ga naar eind(119) Les révoltes plus nombreuses sous Yolande de Bar s'estompent avec ses successeurs tandis que la mainmise du pouvoir princier bourguignon s'affirme. La ville se dote d'une enceinte fortifiée composée de 28 tours, les dépenses militaires s'accroissent comme nous le prouvent les comptes de bailliageGa naar eind(120); ajoutons que c'est également au milieu du XVe siècle que la grande église paroissiale Saint-Éloi est érigée, qu'un imposant beffroi de 58 mètres de haut domine alors la cité, sans omettre l'installation de plusieurs congrégations nouvelles intra-muros.Ga naar eind(121) La ville connaît alors une prospérité incontestable confirmée par l'octroi de 1409Ga naar eind(122): Dunkerque et Bergues versent la même somme de 479 lb 14s 10 d, moins que Nieuport (671 lb 12 s 8 d). En 1483, Jacques de Savoie n'écrit-il pas que ‘la ville est belle, grande et notable, close, avironnée et dûment fortifiée de murs, tours et fossés... bien populée et garnie de gros et riches marchands’? | |
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![]() Vue de Boulogne à la fin du XVIe siècle par Claude Chastillon. A - cathédrale Notre-Dame avec son haut choeur du XIVe siècle; B - Le beffroi caché partiellement par l'abbatiale Saint-Wulmer; C - Le château; G - La tour d'Ordre; K - L'église Saint-Nicolas dans Histoire de Boulogne-sur-Mer, dir. Alain Lottin.
A cette date, les trois villes relèvent d'entités territoriales bien différentes: Boulogne est redevenue française en 1477, Calais est toujours anglaise et Dunkerque se montre plus que jamais flamande et bourguignonne pour appartenir bientôt à un ensemble encore plus vaste, les Pays-Bas espagnols; de facto, le littoral est devenu enjeu stratégique à un moment où ‘l'Europe devient de plus en plus maritime’.Ga naar eind(123) Certes, il ne s'agit pas ici des plus grandes villes de l'Occident médiéval, ce sont des villes moyennes, mais n'oublions pas qu'elles constituent la trame essentielle du réseau de l'époqueGa naar eind(124) et qu'elles assurent la liaison entre ville et campagne, avec un hinterland rural qu'elles ne dominent pas encore parfaitement, condition sine qua non à un développement international possible. Cependant, comme l'a dit M. Mollat, ‘l'Europe médiévale a légué une gamme de ports adaptés au matériel naval de son temps, mais leur nombre, supérieur aux possibilités d'une saine rentabilité’Ga naar eind(125) sur un espace aussi res- | |
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treint que notre littoral, ne pouvait-il pas apporter que rivalité et concurrence? Enfin, ‘cet automne du Moyen Age’ à travers ces trois exemples n'annonce-t-il pas ‘le printemps des Temps Nouveaux’ selon une expression de P. WolffGa naar eind(126)? N'assiste-t-on pas au démarrage commercial d'un portGa naar eind(127) à un moment où beaucoup n'ont parlé que de dépression économique? Cette étude ne corrobore-t-elle pas les propos déjà avancés par un certain nombre d'historiensGa naar eind(128) d'une reprise plus ou moins précoce selon les régions de l'Occident médiéval? | |
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Samenvatting:Bonen (Boulogne) was al een nederzetting in de Oudheid, maar evolueert nadien in de luwte van de grote gebeurtenissen en ondervindt weinig of niets van de elkaar opvolgende oorlogen en vredesverdragen. Pas vrij laat, in het begin van de 13de eeuw, wordt Bonen (Boulogne) een echte stad.
Duinkerke en Calais zijn veel recenter gesticht, in de tweede helft van de 12de eeuw, omdat hun oprichting op dat moment voor de landheer opportuun is. Calais ontwikkelt zich snel vanaf de daaropvolgende eeuw en ook al is haar situatie vanaf 1300 omstreden, toch blijkt het onbetwistbaar strategische belang van de stad uit de inname door de Engelsen in 1347. Calais wordt vooral belangrijk als garnizoensstad, maar ondervindt al gauw moeilijkheden. De stad blijft echter enkel Engels omdat de koning dat zo wil.
Tegen het einde van de 14de eeuw kent Duinkerke een versnelde economische bloei onder Bourgondisch bestuur.
Gedurende de 15de eeuw behoren de drie steden tot verschillende mogendheden. Omdat hun potentieel steeds interessanter wordt, groeien ze in die periode uit tot een echte twistappel in het feodale Westen.
(Uit het Frans vertaald door Johan Feys) |
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