Partie du siège central de Philips à Eindhoven.
Le nouveau président de Philips se voit ainsi confronté à une structure organisationnelle et à une culture d'entreprise spécifique qui remontent aux origines de l'usine. Ce n'est qu'au cours des dernières années que l'on s'est efforcé de les adapter aux exigences de notre époque. Trop tard, hélas, car entre-temps l'entreprise a dû céder beaucoup de terrain aux concurrents japonais.
Lorsque les frères Gerard et Anton Philips commencèrent à fabriquer des lampes à incandescence en 1891, l'un des deux s'occupait de la production, l'autre de la vente.
Cette répartition entre la technique et le commerce telle qu'elle se personnifiait chez les frères Philips a marqué l'entreprise jusqu'à nos jours. Elle servait de base, jusqu'il y a peu, à la structure organisationnelle, et chaque section était dirigée par un fonctionnaire technique et un fonctionnaire commercial. Ceux-ci servent souvent des intérêts iontradictoires. Alors que le technicien veut délivrer un produit aussi parfait que possible, le vendeur cherche à proposer au niveau des magasins d'électroménager un produit le meilleur marché possible. Ainsi s'est développée au cours des décennies une véritable culture de lutte au sein des divisions, ce qui débouchait sur une élaboration ralentie des décisions. Lorsqu'un produit fini était enfin présenté, il apparaissait clairement que ce n'était pas l'intérêt du client qui avait prévalu mais qu'il était le résultat d'un compromis entre les sections technique et commerciale.
La culture d'entreprise constitue le deuxième problème fondamental pour Timmer. L'expansion de l'entreprise à partir de la région d'Eindhoven a eu pour effet que les tendances à la bureaucratie et à l'administration propres au siège d'Eindhoven ont été érigées en norme. Des fonctionnaires ne vont pas à la recherche de responsabilités mais essaient plutôt de les fuir. Il y a un habitus qui consiste à anticiper ce que désire entendre le chef, et cela se pratique d'un niveau administratif à l'autre, jusqu'à l'échelon supérieur. Ainsi, en avril 1990, Van der Klugt a reçu des informations par trop optimistes sur l'état des choses, ce qui a sûrement contribué à précipiter son départ.
C'est pourquoi Timmer se préoccupe non seulement d'assainissement et d'organisation, mais consacre également une attention particulière au fonctionnement des différents niveaux de management. Il invite les managers à cesser d'imputer la situation actuelle au monde extérieur mal intentionné et à la concurrence, à s'interroger sur leur propre philosophie et à chercher en eux-mêmes les causes des problèmes. Voilà un premier pas dans le changement de mentalité absolument indispensable chez la multinationale Philips pour aborder avec confiance son deuxième siècle d'existence. ■
Erik de Boer
(Tr W. Devos)