Septentrion. Jaargang 42
(2013)– [tijdschrift] Septentrion–
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Querelles autour d'un petit polderDepuis des années les Pays-Bas et la Belgique se chamaillent à propos d'un polder situé sur la frontière. Le Hedwigepolder doit être inondé, autrement dit dépoldérisé. C'est du moins ce que les deux gouvernements ont décidé il y a plusieurs années, mais le gouvernement précédent des Pays-Bas a refusé d'exécuter la décision. Le nouveau gouvernement, avec le même Premier ministre mais un autre partenaire de coalitionGa naar eind1, consent à inonder ce coin de la Zélande. Nombreux sont en Zélande les adversaires d'une dépoldérisation, même s'il s'agit d'une zone relativement restreinte - une centaine d'hectares. Dépoldériser a une connotation forcément négative dans une province où 1 800 personnes laissèrent la vie et 100 000 habitants perdirent tout ce qu'ils possédaient lors du raz-de-marée de 1953Ga naar eind2. Cette catastrophe fut à l'origine du plan Delta: les digues furent rehaussées et la seule idée que l'une d'entre elles puisse être percée délibérément pour inonder un polder suscite en Zélande une levée de boucliers. Les problèmes autour du Hedwigepolder apparurent en 2005. Les navires qui se rendent au port d'Anvers doivent passer par l'Escaut occidental. Les Pays-Bas et la Flandre![]() ‘Sauvez notre duchesse Hedwige’.
s'accordèrent sur le fait que de grands bateaux devraient avoir accès au port, raison pour laquelle il est nécessaire d'approfondir l'Escaut occidental, faute de quoi les navires risquent de s'échouer. Pareil approfondissement causerait d'inévitables dommages à l'environnement, qui selon la réglementation européenne exigeraient une compensation. Il faudrait donc créer ‘un nouveau coin de nature’. La première enquête, recommandant d'obtenir ce nouveau coin de nature par l'inondation du Hedwigepolder, entraîna d'âpres critiques. Suivraient de nombreuses autres investigations accompagnées de nouvelles négociations politiques compliquées. Toutefois, en Zélande, tout le monde n'était pas hostile aux plans proposés. Les amis de la nature ainsi que les organisations environnementales étaient favorables à la dépoldérisation. L'association de protection des oiseaux, par exemple, intenta un procès à l'État néerlandais et estima que celui-ci devrait entamer la dépoldérisation au plus vite. Elle perdit son procès. Les plans concernant le polder en question furent traités différemment suivant le gouvernement en place. Lorsque les chrétiens-démocrates firent partie du gouvernement, ils cherchèrent des alternatives à la dépoldérisation. | |
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Quand le parti chrétien-démocrate CDA participa en 2010 au premier cabinet Rutte, il ne fut même plus du tout question de dépoldérisation; l'appui dont bénéficiait ce gouvernement de la part du parti populiste de droite de Geert Wilders n'y était pas étrangerGa naar eind3. Le Zélandais Ad Koppejan, parlementaire CDA, était farouchement opposé à la dépoldérisation. Il était également tout à fait hostile à la collaboration avec Wilders. La voix de Koppejan était cependant nécessaire à la majorité gouvernementale à la Chambre. Il finit par voter pour le nouveau cabinet. Bien qu'il n'y eût officiellement aucun lien entre les deux phénomènes, le gouvernement Rutte I décida de ne pas dépoldériser, nonobstant les accords avec la Flandre et la législation européenne. Nouvelles études, nouveaux rapports. Le mouvement écologique continua d'insister sur la dépoldérisation. Le secrétaire d'État Bleker proposa un autre endroit pour la nouvelle nature à créer et estima que l'Union européenne n'avait pas à se mêler du problème. Mais en Flandre et à Bruxelles on ne l'entendit pas de cette oreille. Le ministre-président flamand menaça d'entamer une procédure d'arbitrage contre les Pays-Bas. De fait, le port d'Anvers a perdu des millions à cause de la politique des gouvernements néerlandais successifs. Entre-temps l'Union européenne a engagé une procédure parce que les Pays-Bas ne se sont pas tenus aux accords. Les relations autrefois très amicales entre les Pays-Bas et la Flandre semblent souffrir du conflit causé par ce petit polder. De nombreuses questions sont mises en liaison avec le problème de la dépoldérisation. Dans la province du Brabant-Septentrional, au sud des Pays-Bas, on va jusqu'à établir un lien entre le problème de la dépoldérisation et le nouvel horaire des trains. Les responsables ne le disent pas à voix haute, mais les voyageurs néerlandais sont surpris de ne pouvoir se rendre à Anvers que par omnibus. Le 12 septembre 2012, il y eut de nouvelles élections aux Pays-Bas. Le premier cabinet Rutte était tombé sur des mesures de restrictions économiques. Un deuxième cabinet Rutte vit le jour après une courte période de formationGa naar eind4. Aujourd'hui, le parti libéral VVD collabore avec le PvdA, de tendance sociale-démocrate. Sans trop entrer dans les détails, l'accord de gouvernement prévoit néanmoins l'inondation du polder. Sans aucun doute les Flamands sont ravis de ce changement de cap, mais les Zélandais, et plus particulièrement les habitants des environs du polder, promettent une longue bataille juridique autour de la question. Le Hedwigepolder n'est pas près d'être inondé. joris van de kerkhof |