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Keetje (1919)

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Genre

proza

Subgenre

roman


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Keetje

(1919)–Neel Doff–rechtenstatus Auteursrecht onbekend

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[V]

Elle zézayait un peu; elle avait des grosses joues très rouges, de gros seins que j'enviais, et la démarche difficile à cause de véritables coussinets de chair qui lui rembourraient la plante des pieds. Dans les allées désertes du Parc, où les hommes nous attiraient, elle les traitait de voyous, quand ils allongeaient les mains vers sa poitrine.

J'étais loin d'avoir sa hardiesse avec les hommes. Lorsqu'on lui posait un lapin, elle trouvait quand même une croûte chez sa mère; puis, elle, c'était pour acheter des colifichets et des gâteaux... Mais au temps où, moi, je devais me prostituer, je pleurais tout le long de la route quand, après semblable corvée, il me fallait rentrer les mains vides et dire aux petits qu'ils devaient se coucher encore une fois sans manger, eux qui avaient trompé leur faim pendant toute la soirée en se racontant des histoires de brigands... Souvent, j'arpentais durant des heures les rues obscures d'un faubourg, n'osant entrer ou espérant les trouver endormis. Maintes

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fois aussi je marchais le long du canal, me demandant si je ne ferais pas bien de m'y jeter.

Ces choses-là étaient finies. Si j'accompagnais Stéphanie, c'était par amitié, je me louais tous les jours d'avoir, une fois pour toutes, supprimé cette honte de ma vie.

Mais je n'arrivais pas à comprendre que les gens bien habillés, bien logés et mangeant à leur faim, ne fussent pas d'honnêtes gens: je croyais très sincèrement que la misère seule avait engendré la prostitution... Cependant ces hommes, pour le plaisir, ramassaient n'importe quelle femme, ce que, moi, je considérais comme le comble de l'abjection... Quand je les voyais être cochons et butors, tout se brouillait dans mon cerveau... Pourquoi, pourquoi, sont-ils ainsi? ils ont tout pour être honnêtes... Et pourquoi étaient-ils ainsi avec moi?... Ils auraient bien dû voir cependant que ce n'était pas pour m'acheter des petits souliers, ou par passe-temps, que je me livrais à eux, des inconnus.

Je croyais qu'ils devaient deviner ma position... jamais personne n'a rien deviné... peut-être une fois, un officier... Il m'avait donné quelques francs d'avance. Pendant que je les roulais dans un petit papier, je vis qu'il considérait mes bras maigres, ma chemise mouchetée de chiures de puces. Il me leva la tête

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par le menton et me regarda un moment, mais je fermai les yeux pour ne pas me livrer... il me donna encore deux francs.

Je sentais très bien que, pour les hommes, une prostituée est un être hors nature, incapable d'aucun sentiment humain, et seulement apte aux conceptions viles. Il n'est même pas besoin, pour eux, d'être prostituée: il suffit d'être une petite fille indigente et à leur merci...

Un jour, chez un peintre, une dame de ses élèves venait de partir. Le peintre me dit de retourner un tableau qu'il avait acheté dans une vente; il voulait le montrer à un de ses amis qui était là.

- Mon cher, je ne pouvais pas te le montrer devant cette dame, mais regarde ça!... cela ne vaut rien comme art, mais c'est d'un cochon!...

Et, à eux deux, ils faisaient, en riant, ressortir le côté malpropre du sujet.

La dame qui venait de quitter avait quarante ans; moi, j'en avais dix-sept, ces hommes ne savaient rien de ma vie...

Je me croyais donc de bonne foi vouée à ces abjections. J'étais cependant sûre que, si j'avais été riche et artiste, je n'aurais pas acheté ce tableau rien que parce qu'il était ‘cochon’.

Aussi étais-je ahurie et charmée quand Stéphanie traitait les hommes de voyous.

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Je sentais aussi que, si je ne voulais plus me prostituer, je devais soigneusement cacher que je l'avais fait; que, sans cela, jamais je n'aurais pu en sortir, qu'on m'aurait toujours traitée avec méfiance et mépris, qu'on me l'aurait toujours compté comme un crime, qu'aucun homme ne m'aurait tendu la main pour me tirer de là d'une façon honorable... Quant aux femmes, les quelques-unes chez qui j'avais posé étaient d'une politesse si distante, je devinais qu'elles se croyaient d'une matière si différente, que rien n'était à espérer de ce côté.

J'aurais pu chercher une place comme servante, et personnellement j'étais sauvée: oui, mais les petits... et les parents... malgré mon aversion pour eux, j'en avais pitié... Hein gagnait maintenant un franc par jour; Dirk jouait de l'accordéon dans les guinguettes; Naatje posait de temps en temps les anges chez les peintres. Mais cela ne suffisait pas...il fallait donc que je restasse encore parmi eux jusqu'à ce qu'ils fussent plus grands.

Toujours et partout ces idées se bousculaient dans ma tête, et souvent, pendant la pose, le peintre me demandait pourquoi j'avais une expression si lugubre ou si épouvantée.

 

Stéphanie m'emmenait le lundi soir dans les bals d'étudiants. Là on était fou ensemble; ces

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jeunes gens étaient charmants et vous traitaient d'égal à égal. J'avais surtout besoin de cela, de ne plus être traitée en inférieure ou en être suspect, et le premier étudiant qui, un soir, m'acheta au bazar une paire de boutons de manchettes, par pure gentillesse, n'a jamais su quel battement de coeur me donna ce geste aimable.

Un autre nous avait amenées. Stéphanie et moi, dans sa maison de campagne aux portes de la ville, pour manger des poires. Apercevant dans une serre des grappes de raisin, je lui racontai que mon petit frère Klasje avait la variole et que le médecin avait dit que des raisins lui feraient du bien.

- Je n'ose pas te donner de ceux-ci: ils ne sont pas mûrs, et ma mère serait fâchée si je les cueillais.

Mais, en nous reconduisant, il m'acheta chez une verdurière une belle grappe de raisins.

- Voilà pour ton petit frère...

Ces attentions exquises me rendaient fière et heureuse.

Naturellement j'eus des amants parmi eux; ce m'était une joie de me donner. Arrangez cela comme vous voudrez, j'avais la certitude que je me relevais... Puis leur beau langage et leurs voix civilisées m'attiraient; je me rendais compte que ces jeunes gens avaient une éducation su-

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périeure à celle des peintres et des sculpteurs chez qui je posais

Cependant les artistes s'occupaient de moi d'une autre manière. Un d'eux me donna un dictionnaire français-flamand et un livre: Histoire d'un enfant du Peuple, d'Erckmann-Chatrian. Je le lisais le soir, en cherchant chaque mot dans le dictionnaire; mais tous les verbes y étaient à l'infinitif, ce qui me désorientait.

Ils parlaient de tout devant moi, ils discutaient peinture, m'engageaient à aller au Musée et, quand je sus bien lire le français, me prêtaient des livres. Seulement les étudiants étaient de mon âge, et depuis que j'existe, je n'ai jamais été attirée que vers ceux de mon âge. Avec eux, dans les guinguettes et les bals, l'on dansait et l'on chantait, et je me donnais comme j'étais, ce que je n'ai jamais pu faire avec des plus âgés ou des plus jeunes.

Cependant ma beauté avait gagné. Je posais beaucoup dans les ateliers, bien que je ne fusse pas le type de ces peintres flamands, hantés par les femmes de Rubens, et que ma gracilité intimidait presque... Puis je rebrodais les tapisseries et les soies anciennes qu'ils achetaient dans les ventes...


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