Levende Talen. Jaargang 1938
(1938)– [tijdschrift] Levende Talen–
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D'un seul trait de plume, l'auteur exécute tout notre enseignement commercial: ceux qui le donnent et ceux qui le reçoivent. Pour lui, les professeurs de nos H.B.S.-A sont des ignares, les élèves de parfaits imbéciles, qui vont encombrer les bureaux, au grand désespoir des chefs qui sont chargés de les dresser. De plus, ils font très mauvaise figure à côté des élèves des H.B.S.-B et même des U.L.O., etc..... Que Monsieur Keyzer me permette d'abord de lui dire qu'en écrivant de pareilles absurdités il a donné une preuve évidente de son ignorance absolue en matière scolaire. C'est le cas de lui dire avec Molière: Que venez-vous faire dans cette galère? Que dirait par exemple M. Keyzer, si l'un de nous se permettait de critiquer le travail des bureaux et de signaler les énormités au point de vue linguistique que signent tous les jours et sans sourciller, quantité de chefs de bureau et de soi-disant correspondanciers attitrés qui sont peut-être au courant de la pratique ‘système Keyzer’, mais qui ignorent les règles les plus élémentaires de la langue étrangère dans laquelle ils doivent écrire?... Monsieur Keyzer pousserait certainement les hauts cris et lui dirait de s'occuper de ce qui le regarde. Une fois pour toutes, Monsieur Keyzer et tous ses adhérents doivent bien savoir une chose: c'est que nous ne sommes pas à l'école pour enseigner la pratique aux élèves et cela en quatre langues, parfois en cinq! mais pour leur inculquer les connaissances générales dont ils auront besoin plus tard dans les bureaux, et surtout pour leur apprendre à lire et à écrire, sans trop de grosses fautes, les langues étrangères qui leur permettront de gagner leur vie plus tard. Monsieur Keyzer parle de ‘zelfstandig opstellen van brieven’! Et il demande cela à des jeunes cerveaux encore imparfaitement au courant de leur langue maternelle et sachant à peine balbutier un peu de français, d'anglais, d'allemand et d'espagnol!... Encore une fois, l'art de rédiger une lettre empreinte d'un cachet personnel et original ne s'apprend pas sur les bancs de l'école, mais dans les bureaux et même après une très longue expérience. A l'école, notre tâche est de préparer les élèves et non pas de les former à la vie pratique. Ce dernier devoir incombe aux correspondanciers expérimentés, dans le genre de M. Keyzer comme il le dit lui-même. Et les collègues des H.B.S.-A s'en rendent parfaitement | |
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compte. Ils font de leur mieux pour s'aquitter convenablement de leur tâche et ils s'en tirent avec beaucoup de succès. Sont-ils capables de donner l'enseignement commercial que les autorités sont en droit d'exiger d'eux? J'ose l'affirmer sans le moindre doute, et quantité d'autorités universitaires sont de mon avis. M. Keyzer oublie, ou plutôt semble ignorer, que l'obtention des diplômes dont les professeurs de langues vivantes sont titulaires et que leur envient avec raison bien des correspondanciers attitrés et autres, leur a coûté cinq, six et parfois même sept années de travail acharné en supplément d'études préparatoires très solides, et que les connaissances profondes et étendues qu'ils possèdent de la langue étrangère les mettent en état de pouvoir s'assimiler très facilement le bagage commercial relativement maigre dont ils ont besoin pour leur enseignement. Et que penser de cette phrase de M. Keyzer: ‘De meesten voelen er niets voor, hun vacantie op een kantoor door te brengen, te minder, omdat er geen enkele geldelijke belooning tegenover staat. Volkomen begrijpelijk!’? Cette phrase est tout simplement révoltante. Ici encore, M. Keyzer montre clairement qu'il n'a pas la moindre notion de la mentalité des professeurs de langues vivantes. Sans aucun doute, ils ne tiennent pas du tout à passer leurs vacances dans un bureau, mais pour des motifs tout autres que le terre à terre dont M. Keyzer les accuse avec un cynisme impardonnable. Quand on a donné 28 ou 30 heures de leçons par semaines dans 6 ou 7 classes dont le nombre d'élèves atteint parfois 30 et plus, M. Keyzer devrait comprendre qu'on a besoin de se reposer et qu'on n'a guère envie, pendant les vacances, d'aller se plonger dans les transactions compliquées d'une maison d'exportation ou de banque. Et puis, il y a nombre de professeurs qui sentent la nécessité de se retremper dans la langue qu'ils enseignent, en allant passer quelque temps à l'étranger. Cela leur rend beaucoup plus de services vraiment pratiques que tous les termes techniques dont ils pourraient enrichir leur vocabulaire dans un bureau et tous les trucs en usage pour arriver à rédiger une lettre à la manière de M. Keyzer. Comme dit le proverbe: ‘chacun son métier, les vaches seront bien gardées’. Je laisse de côté la sorte de mépris que les actes Handels- | |
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kennis L.O. et M.O.C. inspirent à M. Keyzer; d'autres se chargeront probablement de lui répondre comme il convient, et de plus cela m'entraînerait beaucoup trop loin. Un dernier mot, à propos des aménités que M. Keyzer octroie généreusement à ceux qui écrivent des cours de correspondance commerciale. Ici encore, il fait preuve d'une ignorance crasse. Il oublie de nouveau que de tels manuels ne sont pas destinés à enseigner la pratique, mais n'en constituent que la préparation. Je suis certain qu'il ouvrirait de grands yeux, s'il apprenait le nombre de mois et parfois d'années qu'il a fallu pour compulser des documents et faire un choix judicieux de ce qui est à la portée des élèves et de ce qui peut vraiment leur être utile. Je ne lui dirai pas après combien d'années d'expérience certains auteurs se sont décidés à publier un tel manuel, parce que je suis persuadé d'avance qu'il ne me croirait pas. Dans les ouvrages de cette sorte, les auteurs ne visent pas à la ‘pratique’ dont parle M. Keyzer, mais à la vraie pratique qui consiste à fournir aux jeunes gens de 16 à 18 ans une nourriture saine et facile à digérer. Leur demander de rédiger une lettre commerciale qui témoigne de leur propre initiative, de mener à bonne fin une transaction commerciale dont la réalisation ne leur sera confiée qu'après des années et des années de pratique dans un bureau, serait les inviter à prendre la lune avec les dents. Ce n'est autre que M. Keyzer en personne qui a essayé de réaliser ce tour de force. Le manuel qu'il a publié et pour lequel, si l'on était méchant, on pourrait l'accuser de faire de la réclame, peut révéler par moment un homme de la pratique, mais les collègues qui l'ont mis à l'épreuve ont tous été obligés d'avouer qu'il dépassait la portée des jeunes gens et qu'il était donc inutilisable en classe. Sans parler des fautes de langue vraiment par trop criardes qui y fourmillent et qui empêcheront les professeurs de s'adresser à M. Keyser, malgré la proposition louable et spontanée qu'il a faite à la fin de son article.
Y. DUBOSQ. |
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