Karel Appel de retour aux Pays-Bas
Après de longues pérégrinations, le peintre néerlandais Karel Appel (o1921) est de retour pour quelque temps à Amsterdam, ville où on le traitait de fou quand il se livrait à des assemblages de bouts de bois peints. Les fonctionnaires de la ville se plaignaient alors de la grande peinture murale qu'il réalisa dans la cantine de la mairie d'Amsterdam, et le mur en question demeura caché par des palissades pendant des années.
A l'occasion de son soixantedixième anniversaire, le Haags Gemeentemuseum (Musée municipal de La Haye) et la Beurs van Berlage (Bourse de Berlage à Amsterdam), deux oeuvres de l'architecte Berlage, ont organisé des expositions de peintures de Karel Appel.
Ces expositions nous content l'histoire d'un peintre très dynamique. Toutefois, le
Haags Gemeentemuseum expose aussi des oeuvres nouvelles qui, se distinguant par là du célèbre langage plastique d'Appel, sont demeurées étonnamment noires ou blanches. Selon Rudi Fuchs (
o1942), directeur
Karel Appel (o1921) en 1952.
du
Haags Gemeentemuseum, Appel connaît une ‘seconde jeunesse’. Et cette fois, contrairement à ce qui se produisit il y a quarante ans, Appel eut de bonnes critiques dans tous les journaux et revues.
La philosophie bien connue d'Appel, ‘je ne fais que barbouiller la toile’, illustre le vitalisme du peintre, qui s'oppose à toute théorisation dans la peinture. Karel Appel est l'un des peintres les plus productifs de sa génération, sa vitalité étant comparée à celle de Picasso. Selon Appel, le sujet d'une peinture n'est jamais épuisé aussi longtemps que vit le peintre. Aussi une exposition n'est-elle pas seulement un souvenir ou un hommage, mais aussi et surtout un souvenir pour l'avenir.
Ces expositions constituent une rencontre avec l'histoire. Pas seulement avec l'histoire de l'éphémère mouvement Cobra, mais surtout avec celle d'un peintre, en commençant par son relief intitulé Vragende kinderen (Enfants dubitatifs) de 1949 et en terminant par ses récentes séries de nus toscanes et new-yorkaises.
En 1949, peu après la guerre, Appel écrivit dans C'est notre désir qui fait la révolutioi: ‘Peindre consiste à détruire ce qui précédait’. Cependant, les oeuvres récentes d'Appel ne sont pas marquées par la négation de ce qui les précédait. Il s'agit plutôt, dans ces deux expositions, d'une rénovation des oeuvres antérieures.
Avec ces tableaux d'Appel, le Haags Gemeentemuseum nous montre tout ce qui l'a rendu plus beau en l'espace de quelques années: une lumière éblouissante, un parquet véritable et des parois généreuses qui ne rejettent pas les oeuvres d'art, mais leur rendent pleinement justice. De plus, ces expositions Appel permettent du même coup au musée de montrer au public la manière dont on conçoit la présentation d'oeuvres d'art à La Haye. Rudi Fuchs a eu la bonne idée de programmer une exposition de sculptures africaines en même temps que la grande exposition Appel. Les cent sculptures et plus d'origine africaine encadrent les oeuvres d'Appel comme autant de gardiens discrets et réservés, donnant lieu ainsi à un face à face de sculptures et de peintures. Les têtes déformées et les nus dansants d'Appel se dressent vis-à-vis de nus africains stylisés, mais souvent aussi démesurés.
Chez Appel, la lumière joue un rôle important. Il voyage d'atelier en atelier: de New York en Toscane et du Connecticut à Monaco. Chaque atelier possède une atmosphère et un éclairage particulier, de la même façon que chaque ville, voire chaque village, suit un rythme tout à fait personnel. Les expositions de La Haye et d'Amsterdam donnent à voir ces changements de lumière et de rythme en proposant un aperçu éblouissant et intelligent de l'oeuvre.
Dans une interview, Appel raconta un jour que s'il avait été écrivain, il déambulerait dans les rues avec un bloc-notes et consignerait tout ce qu'il verrait. Selon les propres dires d'Appel, ses peintures trouvent leur origine dans des promenades sans but précis. ‘La rue est mon atelier, c'est ma vie, et la ville est ma dynamo’. Appel affirme qu'il peut voir une image ou une peinture en une fraction de seconde: le jaune d'un taxi surplombé par le rouge vif d'une autopompe, et, dominant ce jaune et ce rouge, le vert foncé d'un camion.
A la Beurs van Berlage, on a pu admirer, outre les Nudes, nus dansants, et le vitrage de près de trente mètres d'Appel provenant de l'ancienne Spaarbank voor de Stad